Samedi 9 Novembre 2024
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11.09.2015
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Un printemps démarré en trombe, une canicule jamais vue en juillet et début août… Puis les pluies d’équinoxe arrivent avec un mois d’avance. Quelle drôle d’année ! Nous sommes allés à la rencontre des premiers vins 2015 en Languedoc, ils sont… blancs !
A la fin de la première semaine de septembre, la moitié des raisins blancs du Languedoc avait été ramassés au terme d’un millésime marqué par les extrêmes, estime Jérôme Hourdel, œnologue à L’Institut Coopératif du Vin (ICV) : « l’hiver et le début du printemps ont été très pluvieux, puis, à partir de la mi-mai, une chaleur estivale s’est installée jusqu’à mi-août et depuis le 20 août, nous sommes dans un régime de temps frais et de fortes précipitations orageuses. Ce régime météo correspond aux pluies d’équinoxes, qui n’arrivent habituellement qu’à partir de la deuxième quinzaine de septembre. »
« La moitié de la vendange en blanc est rentrée, on attaque à présent les rosés et les cépages précoces pour les rouges légers (merlot notamment). La météo des prochaines semaines va être déterminante pour les cépages plus tardifs qui correspondent aux cépages d’assemblage pour les appellations, Syrah, mais surtout Grenache, Carignan et Mourvèdre. Le temps humide favorise la pourriture, avec la complicité des vers de la grappe, qui percent la peau des fruits et favorisent les contaminations par la pourriture, qui sont particulièrement virulents cette année. Il faut donc un temps sec et venteux, avec un régime de vent du nord pour terminer ce millésime en beauté. »
Les blancs du Languedoc-Roussillon montent en gamme
Les vins blancs sont toujours nettement minoritaires dans la production de vin en Languedoc-Roussillon, mais leur part progresse à la production, portée par une réelle demande du public et de beaux succès commerciaux, sur le marché domestique et à l’export. Les experts étrangers les célèbrent, la plus respectée et la plus britannique d’entre eux, Jancis Robinson MW, parle du Languedoc en blanc comme de « la prochaine Bourgogne ».
Le Chardonnay et le Sauvignon s’illustrent par leur fraîcheur et les assemblages et cépages méditerranéens gagnent leurs lettres de noblesse avec la reconversion réussie du muscat en blanc sec et la grande vogue du Picpoul de Pinet.
En 2015, les raisins blancs déjà rentrés sont destinés à la production de vins blancs secs (Picpoul, Chardonnay…) et aromatiques (muscat sec, sauvignon, vermentino). « Ils ont souvent souffert des fortes chaleurs et peuvent manquer d’acidité et de précision aromatique. C’est le défi de ce millésime en blanc », précise Jérôme Hourdel.
Muscats au frais à Miraval
Au Mas Neuf, pendant que les rugbymen de Montpellier vendangeaient, Mathieu Carlier, l’œnologue directeur technique du domaine, faisait un autre constat sur ses muscats secs. « Les 30 hectares du Mas Neuf sont sur une péninsule entre les étangs et la mer. Nous avons bénéficié d’apports marins rafraîchissants au moment des fortes chaleurs, et paradoxalement, nous avons reçu beaucoup moins d’eau au moment des fortes pluies de fin août (le 23 août il est tombé 100 mm à Montpellier, mais seulement 20 mm au Mas Neuf !). Notre position géographique et son micro-climat nous ont permis de faire un très beau millésime 2015 sur nos muscats, en qualité comme en quantité ». Le bourru goûté à même la cuve est très prometteur et confirme ce constat positif.
Vermentino à l’ombre à Montpeyroux
Pour André Suquet, à la Villa Dondona, à Montpeyroux, la clé de ce millésime se trouvait dans la sauvegarde du potentiel aromatique des vins blancs. Loin des influences maritimes, la conduite de la vigne est un outil essentiel contre la surchauffe des parfums de fruit blanc et d’agrumes. Le vin blanc que produit le domaine, avec sa cuvée Esperel, est un assemblage de Vermentino, Roussanne, Marsanne et Grenache blanc : « nous avons vendangé la totalité des blancs que nous avons terminés lundi 7 septembre. Le millésime est beaucoup plus abondant que l’an dernier et la qualité est belle. Je suis convaincu que le travail en finesse des vins blancs dans notre climat languedocien passe commence par la maîtrise de l’ensoleillement des raisins. Je suis particulièrement heureux cette année du résultat d’une parcelle de vermentino où nous avons mené la vigne sur des structures métalliques pour développer le feuillage et protéger les raisins du soleil sous cette canopée. A l’arrivée, la différence entre ces raisins moins exposés à la lumière et à la chaleur, et les raisins issus de parcelles classiques, est saisissante, en termes de fraîcheur et de précision aromatique. »
Picpoul de Pinet : le terroir maritime réussit au piquepoul
Pour le Picpoul de Pinet, la vendange a commencé le 10 septembre, Guy Bascou, président du syndicat de l’appellation et vigneron au domaine de la Condamine l’Evêque : « Nous commençons le 10 et finirons dix jours plus tard. On peut déjà parler d’un millésime très sain. Nous avons eu peu ou pas de vers de la grappe, contrairement à d’autres zones du Languedoc. Nous luttons contre les papillons qui les pondent sur les grappes grâce à la confusion sexuelle par phéromones que nous pratiquons sur les 1200 hectares de l’appellation. Et cela marche !… Nos foyers de pourriture sont donc restreints au maximum. Maintenant, s’il tombe 100 mm dimanche il faudra faire vite derrière pour tout ramasser. Mais on est déjà en bonne situation de maturité. La vendange est compliquée par le fait que cette année, tout est mûr en même temps, les précoces rejoignent les tardifs qui sont très en avance…»
Du point de vue qualité, le Picpoul de Pinet 2015 reste frais : « La particularité de l’appellation Picpoul de Pinet est de produire à Pinet et dans les communes environnantes, un vin blanc sec à partir du cépage piquepoul blanc », rappelle Guy Bascou, « Dans notre climat méditerranéen, rafraîchi par la mer et l’étang de Thau, ce cépage indigène baisse en acide malique quand il mûrit mais conserve des taux d’acidité tartrique qui préservent sa fraîcheur. C’est pourquoi même sur des millésimes très chauds, nous n’avons jamais eu à ajouter d’acide tartrique dans nos vins* et ce n’est pas encore pour cette année ! ».
* L’acide tartrique est un acidifiant des moûts ou des vins. Il est aussi employé pour affranchir les cuves en ciment.
L’ajout d’acide tartrique pour acidifier les moûts et les vins est une pratique autorisée et strictement réglementée. Sur raisins ou moût, l’apport maximal autorisé est de 150 g/hl. Sur vin, il est de 250 g/hl.
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