Mercredi 25 Décembre 2024
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07.05.2013
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Le laboratoire de Dany et Michel Rolland, à Pomerol, reçoit et analyse 40 000 échantillons de centaines de propriétés viticoles depuis quarante ans.
Un simple bâtiment récent au fond d’une cour du lieu dit Catusseau à Pomerol, en Gironde. Le lieu est en apparence ordinaire, mais le voisinage l’est beaucoup moins. Les vignes les plus prestigieuses du monde ne se trouvent qu’à quelques centaines de mètres. Le lieu est toujours ordinaire, mais le nom l’est moins. C’est celui de Michel Rolland, l’un des œnologues les plus célèbres sur la planète viticole, associé à sa femme Dany, également œnologue. C’est leur laboratoire. Un de ces lieux mystérieux où le vin passe par le tamis de toutes sortes d’étranges appareils. Ils parviennent à en déterminer les composants avec une redoutable précision.
Au bout d’un couloir, quelques sièges permettent aux visiteurs de patienter. La plupart n’aiment pas attendre, ni montrer qu’ils font analyser le fruit de leurs vignes, ou passer dans la salle de dégustation dans laquelle Parker a parfois officié. Dans ce petit monde des grands châteaux de la rive droite, où la richesse commence à peine à se montrer, où l’on épie encore son voisin, la discrétion reste une tradition, même pour ce qui semble ordinaire. Car ce laboratoire ne cache pas grand-chose. Dès l’entrée, c’est une vision panoramique sur des laborantines en blouses blanches. Elles s’affairent autour d’une multitude de tubes à essais, étiquetés discrètement, codés et parfaitement rangés, prêts à subir une batterie d’analyses.
40 000 échantillons d’environ 400 propriétés passent chaque année entre ces murs, majoritairement de la rive droite de la Garonne. Ils en ressortent sous forme de papiers, des comptes-rendus qui traduisent en niveaux d’alcool, sucre, pH, etc., la complexité de l’élaboration du vin.
La terre avant tout
Mais pour Dany Rolland, le vin ne se résume pas à ces formules chimiques. C’est même tout le contraire. « C’est le terroir, le travail de la vigne, l’attention que l’on porte au chai, à la vinification, qui font finalement la différence. » Pour elle, son mari Michel Rolland a justement révolutionné l’approche de l’œnologie en sortant du laboratoire, en se démarquant du chimiste, en arpentant les vignobles, « en s’intéressant à la terre ». L’opposé de la réputation qu’on lui prête, celle de l’homme qui uniformise le goût du vin à travers le monde par ses formules magiques.
« C’est le contraire. Les conseils de Michel et de nos œnologues ne peuvent pas se donner sans aller sur les propriétés, sans tenir compte du terroir. » Ce volet « conseil » est d’ailleurs celui qui s’est fortement développé ces vingt dernières années, sur tous les continents, alors que l’activité labo est restée stable. Mais elle a lancé la petite entreprise Rolland il y a quarante ans. En 1973, le couple s’est associé aux propriétaires d’un laboratoire d’analyses à Libourne. Ils leur ont confié les clés, jusqu’au déménagement à Pomerol plusieurs années après. Michel Rolland a creusé son sillon dans les propriétés. Il a accompagné la révolution qualitative. « Les premiers changements sont arrivés dans les années 1980. C’est vraiment à partir des années 1990 que la qualité s’est imposée », résume Dany Rolland. Du matériel plus moderne, une attention particulière à la terre et à la vigne, des chais dans lesquels on soigne les détails. L’entreprise Rolland a prospéré en même temps que cette évolution. Son laboratoire est le socle de cette réussite, aujourd’hui son discret emblème, à l’image du château Fontenil à Fronsac, que le couple bichonne depuis vingt-cinq ans.
Bruno Béziat
Photo : Rolland Collection
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