Languedoc week : l’AOP Côtes du Roussillon et Villages défie le temps

Organisée vendredi 28 avril pour les 40 ans de l’AOP Côtes du Roussillon et Villages, la verticale partielle des domaines Cazes et de la Casenove confirme l’aptitude à la garde des vins issus de ce vignoble plurimillénaire, le plus ancien du monde par son capital ampélographique, engagé depuis 40 ans dans une hiérarchisation en vue de la reconnaissance de ses terroirs en crus.

Quatre décennies retracées en huit flacons de légende, les millésimes 2012, 2004, 2000, 1996, 1994, 1990, 1989, 1988. Organisée vendredi 28 avril lors de la Languedoc Week pour les 40 ans de la reconnaissance en AOP des Côtes du Roussillon et Villages, cette verticale partielle des domaines Cazes et La Casenove a confirmé la grande capacité de garde des vins issus de ce vignoble encastré entre l’Espagne et les Corbières audoises, davantage connu pour sa production de Vins doux naturels (VDN) représentant 80% de la production française.

Les Aspres, vers la reconnaissance Villages

Les robes étaient dans l’ensemble évoluées, les arômes d’une grande complexité au nez sur des senteurs café, tabac, raisins secs, cerise, kirch avec une très belle tenue en bouche. Un sans faute pour ces vins, un blanc AOP Côtes du Roussillon 2012 du domaine Vaquer et sept rouges AOP Côtes du Roussillon et Côtes du Roussillon Villages issus principalement des terroirs de Rivesaltes et du secteur des Aspres, îlot géologique regroupant 37 communes. Ce dernier territoire accédera, en 2017 mais sur la vendange 2016, en appellation Côtes du Roussillon Villages Les Aspres, franchissant une nouvelle étape dans la hiérarchisation qualitative engagée par les vins du Roussillon depuis quarante ans : il prévoit une reconnaissance progressive allant des Côtes du Roussillon aux Côtes du Roussillon Villages, pour accéder à la dénomination de communes (Caramany, Latour de France, Lesquerde et Tautavel) et enfin, au dernier étage de la fusée, à la reconnaissance ultime en cru à l’exemple des Maury secs.

Les plus vieilles vignes de France

« Encore trop souvent les vins secs du Roussillon sont assimilés à des vins sur le fruit, gouleyants, qui se boivent relativement jeunes alors que leur capacité de garde ne fait pas de doute », observe Xavier Hardy, responsable formation et communication au CIVR en charge de la dégustation.

Cette capacité de garde des vins du Roussillon tient à plusieurs facteurs : la topographie d’une part, 80% du vignoble étant planté en coteaux jusqu’à 600 m d’altitude, ce qui entraîne des rendements parmi les plus faibles de France avec 30 hl/ha en moyenne les bonnes années. L’âge des vignes ensuite, parmi les plus vieilles de France avec des ceps de Grenache noir, gris ou blanc, de Cinsault ou de Carignan pouvant atteindre cent ans et plus.

« Le Roussillon est la région viticole mondiale qui dispose de la plus grande superficie de vignes d’environ soixante ans, explique Fabrice Rieu, le président du CIVR. La plupart ont été sauvées de l’arrachage via la tradition des VDN qui a permis de maintenir notamment nos Grenache, ces derniers représentant aujourd’hui 8000 hectares sur les 22 000 du vignoble. Et qui dit vieilles vignes, dit vignes enracinées ! La vigne étant une liane, pas un arbre, elle va chercher en profondeur les éléments fondamentaux à son équilibre, ce qui préserve aux vins une fraîcheur naturelle qui leur permet de défier le temps. »

CARNET DE DÉGUSTATION

Les vins dégustés sont actuellement à la vente, entre 20 et 60 € la bouteille.

– Domaine Vaquer, AOP Côtes du Roussillon Blanc, « L’Exception » 2012
Nez d’amandes grillées et de noisettes torréfiées pour cet assemblage de Grenache gris et blanc (70%) complantés, sur des vignes de plus de 50 ans. Bouche arrondie, très ample, c’est droit, tendu et frais.

– Domaine Cazes, AOP Côtes du Roussillon Villages, « Alter » 2004
Nez frais, belle tenue aromatique en bouche sur des fruits mûrs légèrement compotés. Les tannins sont encore très présents et bien ronds pour cet assemblage Syrah (40%), Grenache noir (30) et Mourvèdre (30), à boire dans les 2-3 ans.

– Domaine de la Casenove, AOP Côtes du Roussillon rouge, cuvée « Jalabert » 2000
Dominante Syrah (80%) pour ce vin qui traduit une autre époque, celle où ce cépage rhodanien en vogue était introduit en Roussillon. Il recule aujourd’hui devant le Grenache, mieux adapté à la sécheresse. Belle tenue aromatique pour ce vin issu du territoire des Aspres, élevé 24 mois en fûts de chêne neuf.

– Domaine Cazes, AOP Côtes du Roussillon Villages, « Alter » 1996
Nez élégant et assoupli, robe un peu tuilée mais la bouche est pleine, sur des arômes de noyau de pruneau, un peu kirchés (le Grenache). Elevé douze mois en barriques de chêne français, ce vin a été mis en bouteille en décembre 2000.

– Domaine de la Casenove, AOP Côtes du Roussillon rouge, Cuvée « Jalabert » 1994
Notes de garrigue très marquées pour ce vin à dominante Syrah (80%) assemblé au Carignan et au Grenache noir, élevé 24 mois en fûts de chêne.

– Domaine Cazes, AOP Côtes du Roussillon 1990
Un petit 12 degrés pour ce Côtes du Roussillon de 27 ans d’âge, le seul de la dégustation. Issu d’un assemblage Syrah (40%), Grenache (30%), Mourvèdre (20%) et Carignan (10%), il a été élevé en cuve pendant un an, mis en bouteille 18 mois après la récolte et tient encore son rang.

– Domaine Cazes, AOP Côtes du Roussillon Villages 1989
Notes de tabac, de raisin sec et de kirch pour ce flacon à la belle complexité aromatique. Belle tenue en bouche et grande élégance, sur des degrés là aussi plus bas (12°). La mise en bouteille a été effectuée en juillet 1991 après 12 mois d’élevage en cuve acier inox puis 12 mois de plus en barriques.

– Domaine Cazes, AOP Côtes du Roussillon Villages 1988
Très épicé, très pin, romarin, cet assemblage Syrah (30%), Grenache noir (30%), Mourvèdre (20%) et Carignan (20%) est encore doté d’une très belle vitalité. La bouche est tendue.