Lundi 18 Novembre 2024
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07.04.2016
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Pour la deuxième année d’affilée, la campagne des Primeurs se déroule sans Robert Parker. Le monde des grands crus peut-il se passer de son grand manitou ? Réponse avec Olivier Bernard, du Domaine de Chevalier.
« Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé ! » Ce célèbre vers de Lamartine pourrait-il, à lui seul, résumer la situation du vignoble bordelais depuis que le célèbre critique américain Robert Parker a annonçait qu’il ne couvrirait plus les Primeurs, il y a deux ans ? Capable de faire la pluie et le beau temps sur les chiffres-d’affaires à la faveur de ses notes, il restera comme l’un des meilleurs prescripteurs. Dès lors, comment faire sans lui ? Peut-on vivre heureux sans un grand manitou à l’audience mondiale ? A cette question, Olivier Bernard, le propriétaire du Domaine de Chevalier, cru classé de graves, répond par l’affirmative.
« Parker a fait beaucoup de bien pour Bordeaux et on le gardera comme un très grand souvenir pour Bordeaux, reconnaît-t-il. Mais il est de 1947, il y a un âge où on s’arrête. Aujourd’hui, il n’y a pas « d’après Parker » dans le sens où je ne vois pas un deuxième Parker en train de naître. Je pense qu’il y a plutôt, grâce à Internet, des informations croisées. Des sites travaillent déjà ainsi en collectant les notes d’un certain nombre de grands professionnels et en faisant des moyennes. A l’avenir, c’est un ensemble de note que l’on appréciera. »
Une pluralité qui ne déplait pas à Olivier Bernard : « C’est intéressant d’avoir la notation de plusieurs personnes. On n’aime pas tous les mêmes voitures, on ne mange pas tous la même chose, le fait d’avoir plusieurs critique, plusieurs aides, plusieurs choix, pour moi c’est quelque chose d’essentiel. Il n’y a pas une vérité. »
L’effet Parker
Néanmoins, pas question de minimiser l’impact des notes Parker. « L’effet Parker était assez génial, souligne-t-il, car lorsqu’il mettait une grosse note sur un vin, le vin prenait une plus-value très forte, jusqu’à 100 euros en deux jours. Les vins pouvaient passer de 60 à 160 euros. C’était un formidable coup de projecteur sur le cru. Mais pas seulement. Car par rapport aux vins plébiscités par Parker, les autres, ceux à 60 euros, apparaissaient finalement comme pas « chers ». En fait, la note Parker tire tout le monde vers le haut. » A titre personnel, il ne cache pas qu’il aurait aimé obtenir un 100/100 de Parker : « Ce serait idiot de dire le contraire. Chevalier est un des crus qui, sur les dix dernières années, n’a pas eu une note en dessous de 90. Toutes nos notes sont entre 90 et 95, ce qui montre toute notre régularité. »
Pour autant, Olivier Bernard ne cultive aucune nostalgie de cette époque. « Ce qu’on constate, aujourd’hui, avance-t-il, c’est qu’il y a moins d’excès, c’est plus naturel. L’autre conséquence, c’est que sans Parker, le négoce retrouve encore plus son rôle de conseil. C’est important. » A ce titre, ce millésime 2015, déjà encensé par la critique, semble tomber à… point nommé. Comme pour mieux tourner la page.
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