Dimanche 22 Décembre 2024
Auteur
Date
03.10.2018
Partager
Les cieux ont décidé de gratifier le Beaujolais d’une suite de beaux millésimes depuis 2015, dont 2018 serait le point d’orgue. Si les trois années précédentes ont offert de belles qualités de raisins, soit sur la concentration et la matière en 2015, ou plus en finesse en 2016, 2018 a été le plus bienveillant des millésimes, en cumulant les qualités des précédents, sans aucun des éléments négatifs qui avaient pu obscurcir les récoltes passées, comme la grêle ou le gel.
2018 est donc un millésime qui n’a pas fait de jaloux, et a redonné le sourire à l’ensemble des vignerons, quelle que soit leur appellation.
De façon général, le printemps a permis à la vigne de se constituer des réserves d’eau, quant le soleil et les chaleurs printanières et estivales ont apporté leur concours pour une maturation optimale.
Les raisins sont sains, pas ou peu de traitements ont été nécessaires, et se présentent dès la vendange sur un bel équilibre.
Le gamay a été vendangé avec une facilité presque déconcertante et s’est offert dans sa quintessence, tandis que le chardonnay a exigé un peu plus de soins et de précautions. Plus susceptible de souffrir de la chaleur, les vignerons ont du le récolter de préférence plus tôt le matin.
Les premières dégustations ont déjà porté leurs fruits en termes d’éloges, comme pour Bertrand Chatelet, Directeur de la Sicarex (Institut de recherche viticole et œnologique du Beaujolais) : « C’est du velours. Les vins vont extraire leur couleur et structure par des macérations longues. Ils sont ronds et soyeux, mais aussi gras et concentrés. Les tanins sont fins et élégants ».
Même son de cloche chez les sommeliers : « les arômes de fruits noirs charnus, de fleurs (pivoine, lilas), quelques notes d’épices et de réglisse s’exhalent. En bouche, profondeur, complexité, élégance, gourmandise se mêlent. Les tanins, eux aussi, bénéficient d’une belle plénitude, procurant une belle persistance. Les vins reflètent bien les terroirs, non seulement en termes de sol et d’exposition, mais aussi le cépage, le Gamay dont la personnalité se révèle dans des conditions optimales », souligne Arnaud Chambost, MOF Sommelier en 2000.
S’il serait facile et légèrement réducteur de résumer 2018 à un laconique « c’est aussi beau que 2015 », il n’en reste pas moins une qualité et une concentration typique des grands millésimes.
Alexandra de Vazeilles, propriétaire et maître de chai au Château des Bachelards, à Fleurie, ne cache pas son plaisir à travailler ce millésime, qui se révèle prometteur. Malgré quelques incertitudes au printemps, qui fut humide et eu pour conséquence un mildiou présent mais enrayé par l’usage de tisanes de plantes sèches et une bonne qualité des sols due aux pratiques de l’agriculture biologiques et de la biodynamie au Château, les conditions des vendanges, avec « des amplitudes de température diurnes importantes avec quelques degrés le matin, et des valeurs au delà de 30°C dans l’après-midi (conditions du millésime 2015) ; se sont révélées extrêmement favorable à la qualité de nos fruits et nous en rêvions. En effet, ces forts écarts journaliers permettent au cep de se ressourcer la nuit et de transpirer le jour. A ce jour, les vins fermentent tranquillement dans nos cuves de béton brutes afin de préserver les qualités intrinsèques de chaque parcelle, et nos levures indigènes font leur travail. Le gamay sur les sols granitiques de Fleurie va se livrer dans sa meilleure version : avec densité et élégance ».
Même son de cloche sur le cru Régnié, où Guillaume Striffling, du domaine éponyme, se réjouit de la qualité des raisins, et note un jus plus concentré que ce que la quantité initiale laissait augurer. Mais la concentration maîtrisée, doublée de gourmandise, est toujours une belle promesse, et la facilité de ce millésime n’en accroit que le plaisir de travailler une belle vendange.
Quant à Dominique Piron, président de l’Interprofession et producteur négociant sur plusieurs crus (Chiroubles, Morgon, Brouilly et Saint-Amour), il souligne la qualité globale et le petit plus de Morgon, qui offre, pour les vins du domaine Piron, encore un peu plus de « tanins, de concentration et d’expression. Le terroir a parlé : les sols à Morgon sont plus profonds avec parfois un peu d’argile. La vigne a donc moins souffert de la sécheresse, et l’expressivité du gamay n’en est que plus évidente ».
Les fermentations sont donc parties vite et sans problèmes, permettant aux vignerons producteurs de s’atteler dès la fin des vendanges à la préparation des Beaujolais Nouveaux.
Le millésime 2018 se dégustera donc en trois volets, à l’image des trois identités composant la nouvelle stratégie de l’Interprofession : en novembre 2018 pour les « Beaujolais de fête, soit les Beaujolais Nouveaux, au printemps 2019 pour une partie des « Beaujolais de caractère », piliers de la Beaujonomie, et à l’issue de la durée d’élevage de 10, 12, 18 ou 24 mois pour les « Beaujolais d’exception ».
Photos Etienne Ramousse / InterBeaujolais
Articles liés