Jeudi 26 Décembre 2024
Photo: P. Martinez
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Date
23.02.2022
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Alors que la famille Pinault entre au capital du champagne Jacquesson à Dizy, Jean-Hervé Chiquet co-gérant et actionnaire majoritaire avec son frère Laurent, nous explique les tenants et les aboutissants de cette nouvelle association qui fait grand bruit en Champagne.
Qu’est-ce qui a amené cette prise de participation de la famille Pinault dans la maison Jacquesson ?
Jacquesson avait depuis très longtemps un actionnaire extérieur, qui n’était pas connu, un gros minoritaire dont nous avons pu enfin racheter la participation à la fin de l’année 2020. Mais c’était quelque chose que nous jugions lourd à assumer pour la famille et nous voulions dès le départ trouver un autre actionnaire, avec si possible un niveau moindre de participation. Nous souhaitions aussi que les relations avec cet actionnaire soient plus fluides qu’avec le précédent. Nous avons beaucoup réfléchi mon frère et moi : il devait être au moins Européen et de préférence français. On nous a fait savoir qu’un certain nombre de personnes étaient très intéressées par un investissement en Champagne, notamment le groupe Artémis. Je vous avoue que nous avons été extrêmement séduits par la ribambelle de jolis domaines qu’il possède ! Ce qui est intéressant, c’est que ce ne sont pas des très grosses maisons, mais à chaque fois des petits domaines de luxe. Je crois d’ailleurs que c’est pour cela que rentrer en Champagne par l’intermédiaire d’une participation minoritaire chez Jacquesson les tentaient beaucoup plus que de racheter une grande marque classique. Il s’agit vraiment d’un choix mutuel : nous nous sommes rencontrés et nous nous sommes appréciés. Ce qui est amusant, c’est que bien que cela soit un groupe important, ce sont des gens avec lesquels nous sommes totalement sur la même longueur d’onde. Même si aujourd’hui, c’est son fils qui gère l’ensemble, nous avons fait la connaissance de François Pinault pour lequel tout ce qui est art et vin reste une priorité. C’est un monsieur absolument remarquable, charmant.
La participation du groupe dans votre capital peut générer de belles synergies, par exemple sur le plan de la distribution…
Il n’y a rien d’opérationnel de prévu. Je dirais que les choses se feront comme elles doivent se faire. Pour nous, il s’agissait d’une association capitalistique intéressée au départ, je ne le cache pas, maintenant oui, bien sûr, il y aura sans doute des choses, il existe des pays où nous ne sommes pas forcément très bien implantés et où ils le sont. Mais, il y a aussi des endroits où nous n’avons pas du tout besoin d’eux, par exemple en France et en Italie, nos deux plus gros marchés.
Vous limitez volontairement votre production à 250.000 bouteilles, investir dans une maison qui ne souhaite pas se développer en termes de volumes, cela peut sembler paradoxal, vous vous tiendrez à ce principe ?
Est-ce qu’ils se sont posé la question des développements en volumes lors du rachat de Clos de Tart ? Cet investissement ne remet pas en cause nos piliers. En revanche, mon frère et moi, nous avons toujours été convaincus que si vous nous trouvez demain matin cinq hectares de vieux pinot noir sur le plus beau coteau d’Aÿ, nous les rentrons sans souci et nous élaborons 30.000 bouteilles de plus. Quand nous avons repris Jacquesson, le volume était effectivement de 450.000 bouteilles, mais nous n’avons jamais voulu baisser notre production, nous avons voulu simplement l’adapter aux seuls approvisionnements qui nous convenaient et que nous maîtrisions. Et il se trouve qu’aujourd’hui nous maîtrisons de la manière dont nous le souhaitons environ 37 hectares de vignes, 29 en exploitation et 8 en achats à nos voisins de parcelles. Nous n’avons pas hésité par exemple à rompre avec un livreur qui possédait cinq hectares sur Aÿ, Dizy, et Hautvillers parce que les raisins que nous vendait la nouvelle génération ne correspondaient pas à nos attentes. La réduction du rendement induite par nos méthodes à la vigne et au pressurage est aussi l’une des causes de la baisse notre production. Enfin, nous ne voulons pas non plus acheter des raisins venus de trop loin. Nous avons ainsi arrêté de nous fournir à Verzenay, non pas pour des raisons qualitatives, mais parce qu’il n’est pas bon de transporter le raisin et que le pressurage s’effectuait sur place par d’autres que nous. Or, nos méthodes de pressurage et de fractionnement des jus sont trop spécifiques pour que nous puissions confier cette étape à d’autres. La famille Pinault et le groupe Artemis ont investi justement parce que le projet leur plaît, sinon ils ne l’auraient pas fait. Vous savez, ils connaissaient déjà nos vins par cœur bien avant de nous rencontrer.
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