Vendredi 22 Novembre 2024
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29.06.2023
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Reconnues en AOC en 1973, les appellations Savoie et Roussette de Savoie célèbrent cette année un demi-siècle d’existence. L’occasion de rassembler les acteurs de la filière, vignerons metteurs en marché, prescripteurs autour d’une grande dégustation au château de Tresserve, sur les rives du lac du Bourget, et de faire le point sur l’évolution du vignoble ces dernières décennies.
En un demi-siècle, le vignoble savoyard a beaucoup évolué, en surfaces et en volumes. Après avoir fortement diminué après la crise du phylloxera, les deux guerres et l’exode rural, il est menacé désormais par l’urbanisation qui grignote les surfaces dans un secteur à forte pression démographique. Dans les années 70, il représentait environ 60 000 hl, une production qui avait doublé pour atteindre 120 000-130 000 hl au début des années 2000, ramenée entre 105 et 115 000 hl lors de la dernière décennie. Il a également été marqué par le recentrage sur les cépages locaux. « Depuis 50 ans, le vignoble a su se redéployer, notamment sur les coteaux. Dans les années 70-80, on produisait surtout du gamay, qui a toujours été présent en Savoie, mais également des cépages internationaux comme le pinot noir et le chardonnay, qui étaient plus faciles à travailler et s’adaptaient mieux au bas de coteaux où se situait à l’époque une grande partie de la production, se souvient Michel Bouche, directeur du syndicat et de l’interprofession des vins de Savoie de 1984 à 2019. Les viticulteurs se sont réappropriés les coteaux, porteurs de qualité, surtout à partir des années 90, et ils ont renoué avec des cépages d’ici comme l’altesse, la jacquère et la mondeuse, les cépages les plus plantés depuis 20 ans. Quant à la marsanne (appelée localement le bergeron), à Chignin, elle a connu un développement exponentiel de quelques hectolitres à 5000 aujourd’hui. » Des secteurs comme Ayze, qui n’ont longtemps fait que des mousseux, ont peu à peu vinifié le gringet en vins tranquilles et l’ont fait connaître hors Savoie.
Des cépages endémiques différenciants
On redécouvre progressivement la jacquère (40 % de l’encépagement) qui a eu un temps mauvaise presse, à l’époque où elle était produite à gros rendements, « mais également parce que les consommateurs n’aimaient pas les vins légers à la fin du XXe siècle, précise Michel Bouche. On a compris que la jacquère et la mondeuse pouvaient donner d’excellents vins quand on les laissait mûrir et sans avoir besoin de chaptaliser. » Les cépages endémiques semblent bien s’adapter au changement climatique. Sur une vingtaine plantés dans la région, une demi-douzaine sont exclusivement locaux (mondeuse noire, mondeuse blanche, persan, altesse, jacquère, gringet), ce qui favorise la différenciation. Sept cépages « anciens » sont aussi en expérimentation : douce noire, dousset (ou jacquère noire), hibou noir, petite Sainte-Marie, bia blanc, mondeuse grise, pinot gris (ou malvoisie). Par ailleurs, 20 % des surfaces sont désormais certifiées en agriculture biologique sans compter les conversions, mais au-delà de cette tendance, Laurent Cavaillé, président de l’interprofession, rappelle que « les pratiques ont beaucoup évolué ces dernières années, visant à préserver les sols et à protéger la biodiversité ».
Une dynamique « blancs » en région et plus loin
La commercialisation a également évolué. Auparavant, les vins savoyards étaient très majoritairement consommés en région, d’abord par les Savoyards mais également par les touristes en station. « Ils sont toujours bus principalement ici, mais grâce à des viticulteurs précurseurs qui ont su élaborer des vins de grande qualité, ils ont été repérés par des prescripteurs comme les restaurants gastronomiques, des sommeliers et des journalistes, et ont ainsi pu sortir de la fondue-raclette » précise Michel Bouche. Les plus grandes cuvées ont commencé à « s’exporter » sur les grandes tables notamment parisiennes et même à l’export qui atteint désormais 7 %. Michel Bouche se souvient qu’un ancien président de l’interprofession disait qu’il n’y avait pas besoin d’aller vendre sur d’autres marchés puisque l’on exportait sur place avec les touristes.
Laurent Cavaillé confirme cette évolution et cette « dynamique de progrès » : « Aujourd’hui, les professionnels comme les sommeliers "s’éclatent" avec les vins de Savoie et la diversité des cépages et des terroirs ; les jeunes sommeliers raffolent de leur originalité et de leur potentiel de fraîcheur. De plus, dans le contexte du changement climatique, nos vins sont de ceux, de plus en plus rares, qui conservent des degrés d’alcool permettant de préserver des équilibres entre l’alcool et l’acidité. » Le vignoble, majoritairement blanc à 72 %, profite aussi de la dynamique de la couleur et des effervescents pour les crémants de Savoie, la huitième et dernière appellation reconnue en 2014. L’interprofession s’attache à renforcer les circuits les plus rémunérateurs car le vignoble, souvent en forte pente et nécessitant davantage de main d’œuvre, engendre des coûts de production plus élevés. Outre la restauration et l’export, elle vise à doper la vente directe en s’appuyant sur la montée en puissance de l’offre œnotouristique. Celle-ci s’est professionnalisée depuis une dizaine d’années (une douzaine de territoires labellisés Vignobles & Découvertes), et de surcroît profite désormais de l’attractivité de la montagne l’été.
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