Vendredi 22 Novembre 2024
©F. Hermine
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Date
04.09.2023
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Les Coteaux-Varois-en-Provence sont incontestablement sous haute pression. Pour cause de millésime rogné par les attaques de mildiou mais également pour remise à plat de la stratégie globale de l’appellation.
Les vendanges viennent tout juste de commencer, aidée fort heureusement par 50 à 60 mm de pluies la semaine dernière qui étaient les bienvenues pour gonfler un peu les baies. Car la récolte en Coteaux-Varois-en-Provence sera maigre. A cause de la sécheresse qui n’a pas fait grossir les raisins mais surtout à cause du mildiou particulièrement virulent au printemps. « Avec plus de 400 mm de pluies entre mai et juin, nous serons sans doute l’une des appellations les plus touchées par le mildiou cette année, estime le directeur de l’AOP, Thomas Giroud. L’effet se fait d’autant plus sentir que 40 % de nos surfaces sont en bio – dont 4 % en conversion. La récolte ne dépassera sans doute pas les 140 000 hl mais celle de 2022 à 147 000 était la plus importante enregistrée [133 000 en 2021, entre 126 000 et 135 000 entre 2018 et 2020]. Heureusement, nous bénéficions cette année d’un bel état sanitaire grâce au vent qui a beaucoup soufflé cet été et assaini les vignes, et de bonnes acidités, ce qui n’était pas le cas l’an dernier ».
Réflexions en cours sur la commercialisation
L’appellation est également sous pression pour cause de méventes. « Le négoce nous a tourné le dos car il est plus facile de vendre des côtes-de-provence » estime Eric Lambert, président depuis 2017 et vice-président de l’union coopérative Estandon, acteur majeur qui commercialise environ deux-tiers de ses vins en Coteaux-Varois. L’appellation qui vient de fêter ses 30 ans en profite pour remettre les choses à plat. Le conseil d’administration a d’abord voté en juin dernier l’allongement du mandat du président de 1 à 3 ans, une durée classique dans la majorité des appellations. « Cela permet de réfléchir à la mise en place d’un véritable plan stratégique, estime Eric Lambert. Nous sommes également en train de mettre en place la réserve interprofessionnelle qui devrait être fixée à 42 hl/ha pour des rendements maximum de 55 hl/ha, libérable si il y a des marchés en face. Fin 2022, nous avions 30 000 hl de stocks mais ils pourraient être régulés par le mildiou ».
L’appellation produit actuellement des vins à 94 % rosés, 3% en blancs, 3 % en rouges sur 3000 hectares et 28 communes entre le massif de la Sainte-Baume et la Via Aurélia. Avec l’extension de l’aire et les plantations, elle a enregistré une croissance forte et rapide qui la met aujourd’hui en difficulté (une production autour de 105-110 000 hl il y a encore une décennie). Elle vient donc de recruter le cabinet montpelliérain Atlasens pour travailler sur un repositionnement, notamment à l’export. « Les côtes-de-provence sont à plus de 40% de ventes à l’international, nous à 25%. Il est vrai que nous avons beaucoup de petites entreprises familiales et de PME de 10-15 hectares qui travaillent surtout en région, en CHR ou au caveau mais on compte également quelques gros domaines comme Escarelle, Blacailloux, Les Terres de Saint-Hilaire, et Cantarelle qui vient d’être racheté par Estoublon, sans doute pour approvisionner Roseblood qui vise les 4 millions de bouteilles mais vendues en IGP Méditerranée, pas en Coteaux Varois » déplore Eric Lambert.
Appel à la mobilisation générale
Différents séminaires seront organisés cet automne avec les adhérents de l’appellation pour fédérer derrière de gros projets plus de 70 caves particulières et les 14 coopératives (dont 9 exclusivement en Coteaux-Varois). Cet été, un questionnaire a été envoyé à tous afin de récolter les avis sur la stratégie globale, la gouvernance, et même un changement de nom. Un appel à la mobilisation « pour redire que l’on a besoin de tout le monde pour faire bouger les choses ».
Autre sujet sensible, le rapprochement des ODG des deux autres appellations provençales. Alors que les Côtes-de-Provence et les Coteaux-d’Aix-en-Provence ont déjà annoncé leurs fiançailles en août, les Coteaux-Varois-en-Provence semblaient être à la traîne. « Nous étions en fait en discussion sur le sujet et nous avions décidé d’en reparler après les vendanges mais comme les Coteaux-d’Aix n’ont plus de directrice – Françoise Piétri est partie en retraite, ils ont accéléré la demande de rapprochement auprès des Côtes-de-Provence, tient à préciser Eric Lambert. Chez nous, il y a moins péril en la demeure puisque nous avons un directeur que nous voulons garder mais sur le principe, nous sommes plutôt d’accord pour mutualiser les services techniques et juridiques ».
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