Vendredi 22 Novembre 2024
©Anne Lacaud
Auteur
Date
23.06.2023
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Comme son père, Jacques Brard-Blanchard, Sophie Laguerre défend les atouts d’une viticulture proche de la nature, qui a su abandonner les produits chimiques
Une goutte dans un océan. La viticulture bio ne pèse pas lourd au pays du cognac : moins de 1 500 hectares de vignes en 2021, chiffre à rapporter aux 83 000 hectares d’un vignoble en pleine extension. Ici, l’estampille AB concerne moins de 2 % des surfaces. Sa part est infinitésimale.
Sophie Laguerre, viticultrice bio à Boutiers-Saint-Trojan (Charente), le reconnaît volontiers. « Le bio, à Cognac, c’est plus de travail et plus de charges, sans guère plus de revenus. Mais il existe ! Il doit être défendu et promu. C’est pour cela que j’ai présenté ma candidature aux premiers Trophées Cognac vignoble engagé », dit celle qui dirige la société Brard-Blanchard depuis 2007.
Une aventure ancienne
Le domaine familial s’étend sur 23 hectares complantés de 10 cépages dans le cru des Fins Bois. On y produit du cognac, bien sûr, mais aussi du pineau des Charentes, des vins sous IGP et du jus de raisin. Tous les produits, certifiés Ecocert, sont vendus à la propriété, dans les foires et salons, et chez de bons cavistes. Une petite partie de la production de cognac est aussi livrée au négoce, notamment à Grand Marnier et à Hennessy. « Je pourrais fournir de petites maisons qui ont désormais une référence bio et valorisent les eaux-de-vie ainsi produites, mais je reste fidèle à ceux qui n’ont jamais laissé tomber mon père dans les moments difficiles », poursuit Sophie Laguerre. Chez Brard-Blanchard, le bio est une aventure ancienne, dont on a célébré les cinquante ans en 2022. Jacques et Dany, les parents de Sophie, se sont convertis en 1972. Ils avaient pour seuls alliés les manuels de la méthode Lemaire-Boucher. « Mon père était allergique au folpel. Lorsqu’il a abandonné l’usage de ce fongicide chimique, ses bronchites à répétition ont disparu. À l’époque, on l’a pris pour un original ! Les débuts furent délicats. Le mildiou et la chlorose malmenèrent les premières récoltes. Mes parents n’ont pas ménagé leurs efforts. Ils ont finalement prouvé qu’il était possible de cultiver la vigne de façon plus naturelle », raconte Sophie Laguerre.
Bio mais aussi bon
Aujourd’hui, le domaine demeure très engagé dans la préservation de la biodiversité. Récemment, un faisan et des lièvres ont élu domicile près des bois et taillis qui ceinturent la propriété. Ils hébergent aussi plusieurs ruches. En 2019, une nouvelle haie en bordure de parcelle a été plantée avec les enfants de l’école. « Le bio, c’est bien. Le bio et le bon, c’est mieux », ajoute celle qui veille à la qualité de ses produits, élégants et fruités, pas trop boisés. Comme son père, Sophie Laguerre présente ses nectars à des concours. En 2022, son pineau blanc et son cognac VSOP décrochaient l’or au Salon de l’agriculture de Paris. Cette année-là, Porte de Versailles, le palmarès charentais avait fière allure. Il récompensait six viticulteurs aux parcours singuliers, pas tous biologiques, mais tous amoureux de leur terroir, comme les Fillioux à Juillac-le-Coq et les sœurs Conte près de Barbezieux.
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