Lundi 25 Novembre 2024
©F. Hermine
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Date
13.11.2023
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La maison Laplace fêtera les 60 ans de la première mise en bouteilles du château d’Aydie lors des Portes ouvertes des appellations Madiran et Pacherenc-du-Vic-Bilh les 18 et 19 novembre prochains. L’occasion de redécouvrir la cuvée château et de découvrir les nouvelles cuvées de la dernière génération.
Quand la nouvelle génération de la famille Laplace, Grégory, sa sœur Camille et leur cousin Bastien, tous les trois autour de la trentaine, reprend en mains l’entreprise vinicole, elle est en grande difficulté. Les jeunes gens récupèrent cinq ans de stocks et 2,5 M€ de dettes, « notamment à cause de l’activité négoce Aramis créée par la génération précédente et qui vendait à perte, en particulier les côtes-de-Gascogne, avoue Bastien. Ces vins-là ne nous ressemblaient pas. Nous sommes une famille historique de Madiran et de Pacherenc-de-Vic-Bilh, spécialiste du tannat et du manseng ; on ne nous attendait pas sur cette IGP. Nous avons donc voulu depuis trois ans redonner goût au tannat en se démarquant avec des vins différents en parallèle de la traditionnelle cuvée Château ».
La nouvelle génération a tourné la page sans couper pour autant les ponts avec François, le père de Camille et Grégory qui les accompagne encore de quelques conseils. Grégory suit les vins, de la vigne à la bouteille depuis sept ans, Camille a repris la gestion et la comptabilité, Bastien, ancien aide-soignant, a pris en charge le commerce « mais nous sommes polyvalents, chacun de nous étant capables de parler des vins et du domaine ».
La famille est installée depuis 1927 sur ce vignoble qui s’étend aujourd’hui sur 70 hectares, à cheval sur les trois départements du Gers, des Pyrénées-Atlantiques et des Hautes-Pyrénées. Il est majoritairement planté de tannat aux côtés du cabernet franc, du petit et du gros manseng. La production est aux deux-tiers en rouge, un quart en blanc et le reste en rosé. « Mon père s’était concentré sur ces cépages pour les décliner en différentes cuvées et il y a encore du potentiel, estime Grégory. Nous avons donc réfléchi à dix ans aux adaptations possibles au changement climatique, surtout après trois années d’aléas difficiles, le gel en 2021, la grêle en 2022 et le mildiou en 2023. La vigne doit d’abord être rentable, même une mauvaise année. Il faut par exemple revoir la taille, le palissage, les porte-greffes, quitte à arracher avant que la vigne ait 25 ans ». La famille a supprimé tous les désherbants et les engrais chimiques dans les vignes certifiées HVE depuis 6 ans. « Nous soignons aussi notre environnement en replantant des haies, se félicite Camille. Et nous avons déjà été récompensés par le retour de chauves-souris, d’abeilles, de coccinelles, de vers de terre… »
Trois jeunes gens dans le vent
La nouvelle génération a lancé de nouvelles cuvées avec l’œnologue d’Aydie, Baptiste Clavé. « Quand quelqu’un a une idée, on la partage, on la teste, on la goûte avec comme principal mot d’ordre : le fruit d’abord » explique Grégory. Le château d’Aydie, tout en gardant son style traditionnel, a arrondi ses tanins avec moins de surmaturité des raisins, moins de sucre et d’alcool. Une identification autre que le terroir a été trouvée pour une gamme en Vin de France, un véritable bestiaire lancé avec Les 2 Vaches Rouges, l’animal emblème du Béarn, déclinée ensuite avec toute la basse-cour : Le Vilain Petit Canard en blanc, Les Trois Petits Cochons Roses en rosé, La Poule aux Œufs d’or en petit et gros manseng, entre blanc sec et moelleux. « On voulait des vins qui nous ressemblent, ironise Grégory. « L’objectif était aussi de faire connaître le tannat mais récolté plus tôt et vinifié en cuves pour gagner en fraîcheur, complète Bastien. Nous sommes finalement la seule famille à faire du 100% tannat avec nos cuvées en rouge et rosé». Un madiran sans sulfites ajoutés est né récemment des réflexions familiales « comme celui que faisait déjà le grand-père Pierre, le premier vigneron à mettre en bouteille dan l’appellation en 1963, raconte Bastien. A l’époque le tannat était acheté par les négociants bordelais pour muscler leurs vins mais pas en 1963. Heureusement le chef André Daguin qui voulait mettre en avant la production locale et qui venait de créer le magret de canard est venu chercher 600 bouteilles chez Laplace et les a fait connaître dans les restaurants. Ce sans-sulfite permet aussi de détacher la notoriété du madiran de l’association avec le gibier et nous fait gagner une nouvelle clientèle, plus jeune ».
L’entreprise d’Aydie est passée de 80 % du chiffre d’affaires en négoce à 20%. Elle élabore désormais neuf cuvées soit environ 650-700 000 bouteilles par an dont 30 % commercialisées à l’export. Et le trio béarnais a encore des idées dans sa besace.
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