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[VINEXPO] A la découverte des vins et cépages turcs

Auteur

La
rédaction

Date

21.06.2013

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A l’occasion de Vinexpo, le journaliste britannique Tim Atkin, Master of Wine, animait une « master class » consacrée aux vins et cépages de Turquie. L’occasion de se plonger dans la richesse et la diversité de ce pays qui produit du vin depuis plus de 7000 ans.

Ils se nomment Narince, Emir, Boğazkere, Öküzgözü, Kalecik Karasi. Ce sont quelques-uns des cépages les plus représentatifs parmi les nombreuses variétés indigènes répertoriées en Turquie, une terre qui est reconnue comme l’un des berceaux de Vitis vinifera en Méditerranée : les plus anciennes traces de vignes cultivées en Anatolie sont en effet datées de plus de 7000 ans. Autant dire que la Turquie, porte du Croissant Fertile, frontière entre Europe et Orient, est une très ancienne contrée viticole, qui demeure à ce jour le cinquième producteur mondial de raisin. Mais ce dernier est très majoritairement consacré à la consommation à table : on estime que 5% seulement de ces raisins servent à faire du vin.

Bien que très éparpillée à travers le pays (entre Thrace, Mer Egée, Mer Noire, Anatolie, Cappadoce) et entre une multitude de petits exploitants, cette production de vin tend à se concentrer dans les mains d’un petit groupe de « wineries », qui dessinent petit à petit le visage moderne de la Turquie viti-vinicole. Six de ces grandes « wineries » était représentées au cours de la « master class » donnée par le Britannique Tim Atkin, dans le cadre de Vinexpo. Une dégustation passionnante, durant laquelle le Master of Wine a présenté dix vins (trois blanc, sept rouges), issus de cépages indigènes, de cépages européens implantés en Turquie, ou d’assemblages entre cépages indigènes et cépages européens.

Cépages d’ici et d’ailleurs

Le rafraîchissant Emir aux nuances d’agrumes, le généreux Narince aux accents de fruits exotiques, l’imposant Boğazkere (littéralement « gratte-gorge », sorte de croisement entre nebbiolo et tannat), le délicat Kalecik Karasi aux faux airs de gamay, l’aromatique Öküzgözü aux notes de fruits noirs et d’épices, voisinaient donc avec les expressions turques du cabernet franc, de la syrah, du tannat, du cabernet sauvignon…

Curiosité du jour, un assemblage « à la bordelaise » mais « made in Turkey » : 50% merlot, 34% cabernet sauvignon, 14% cabernet franc, 2% petit verdot pour le Sur 2010 de Suvla Winery, un vin mûr, solaire, épicé, assez alcooleux en l’état mais doté d’un joli équilibre et d’une belle persistance. Dégusté en fin de séance, juste après une succession de vins monocépages, autres interprétations turques de variétés bien connues chez nous : le Kayra Versus Cabernet Franc 2010, où la « signature » intéressante du cabernet franc s’efface malheureusement derrière un élevage encore trop prégnant ; le Mahrem Syrah 2010 est une syrah très jeune, démonstrative, toute en épices et en poivre, mais à la fougue bien tempérée, dans un style élégant, proche de certaines syrahs italiennes ; enfin, le Mahrem Tannat 2010, bien que doté d’une imposante matière tannique (ce qui n’étonnera personne), se signale par sa densité, son opulence presque pâtissière (tarte aux mûres).

Les régionaux de l’étape

Mais les vins les plus intrigants de cette « master class » sont bien sûr ceux qui font la part belle aux cépages indigènes. Outre les blancs, l’Emir 2011 de Kocabağ Winery (désaltérant) et le Chamlija Narince 2012 de Iram çamlica Winery (nez intense, très fruité, sur l’ananas et la mangue), la curiosité du jour se nomme Prestige Kalecik Karasi 2009, une sorte de « beaujolais turc » fait en macération semi-carbonique, parfumé, gourmand, facile à boire (Kavaklidere Winery). Assez logiquement, les vins à base d’Öküzgözü – peut-être le plus consensuel des cépages turcs – sont agréables et classiques, à l’image du Tuğra Öküzgözü 2010, et surtout le Karma 2010, où le mariage avec le cabernet sauvignon donne un équilibre très séduisant. Ces deux vins sont produits par Doluca Winery.

Enfin, pour clore la dégustation, le fameux 100% Boğazkere, Pendore 2010 de Kavaklidere. Un vin dont le caractère se déploie progressivement, d’abord sur le fruit noir, le clou de girofle, avant que les tanins, serrés, prennent le dessus. Clairement, un vin « viril » à attendre…

Reste à pouvoir se procurer ces vins. Certains sont proposés à l’export, ou achetables en ligne, le plus souvent à des prix accessibles, entre 6 € et 15 €.

Mathieu Doumenge