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La première gorgée de… Pascal Fauvel

Auteur

Isabelle
de Monvert-Chaussy

Date

25.09.2024

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Vous souvenez-vous de votre première gorgée de vin ? Cette première rencontre de votre palais avec le merveilleux breuvage… Dans chaque magazine Terre de vins, un écrivain ou une écrivaine nous raconte, avec ses mots bien sûr, sa « première gorgée ». Cette semaine, Pascal Fauvel.

«  Ton gars n’a qu’à prendre le train pour Libourne, s’il veut faire les vendanges. » Ce judicieux conseil d’un copain de mon père, cheminot comme lui, aura changé le cours de ma vie. Brisé le traintrain d’un parcours balisé et des études de mathématiques qui me conduisaient dans une impasse. Le petit Normand que j’étais au mitan des années soixante-dix allait découvrir le saint des saints des appellations viticoles !

1977 allait s’avérer comme une année charnière. J’avais sympathisé avec un couple de viticulteurs, adhérents de la cave coopérative de Lussac. J’aimais leur hédonisme et je n’avais qu’un désir, être initié à leur monde d’œnophiles passionnés. Ce fut chose faite, au cours d’un déjeuner d’adieu, auquel participèrent leurs sympathiques voisins, propriétaires d’un cru sur Saint-Émilion. 

Deux bouteilles achetées sur leurs conseils respectifs allaient provoquer la petite étincelle qui embrasa mes sens en éveil : un Couvent des Templiers 1973, une véritable délicatesse de fruits rouges et de rose épanouie, issue d’un terroir de sable, m’expliqua son géniteur. J’avalais un peu de ce vin mystérieux. Ce fut alors qu’une émotion sensorielle me submergea, prolongée par la dégustation du Roc de Lussac 1967. Un vin plus austère, de type argilo-calcaire, aux effluves de cuir et de feuilles mortes, un régal sur le plateau de fromages. J’étais aux anges. Deux étiquettes, deux personnalités et que d’histoires à raconter. Je découvrais un nouveau monde qui, toute ma vie durant, allait me faire rêver ! 

Je ne remercierai jamais assez ces deux nectars, dont les premières gorgées auront éveillé, chez moi, des émotions enfouies. Telles de bonnes fées bienveillantes, elles seront restées gravées dans ma mémoire. Depuis, j’ai beaucoup dégusté, pour mon grand plaisir !

Après des études de mathématiques, Pascal Fauvel a viré du côté de la gastronomie, du vin et de la sommellerie. Il est désormais consultant-dégustateur. Auteur de romans policiers, « Saint-Émilion, le cru qui tue » (Geste Éditions), « Meurtres occitans »... Pascal Fauvel déroule ses intrigues dans le milieu du vin. Il a aussi signé le documentaire télé « Saint-Émilion qui l’eût cru » (2007).