Jeudi 19 Décembre 2024
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30.09.2013
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Si les premiers coups de sécateur résonnent déjà dans certains endroits du vignoble, c’est véritablement le mardi 1er octobre que le gros des troupes démarrera. Une chose est sûre, l’année est tardive. Pour le reste, tout est possible, y compris le meilleur ! État des lieux à J-1.
Les derniers résultats de prélèvements du réseau maturation Champagne coordonnés par le CIVC (Comité Interprofessionnel des Vins de Champagne) sont parus jeudi en fin de journée. Le retour d’un bon ensoleillement sur la dernière semaine de septembre, et une verdeur intacte du feuillage ont permis à la photosynthèse et donc à la maturation de bien se poursuivre : + 0, 8 % vol. pour le chardonnay, + 0, 7 % vol. pour le pinot noir et + 0, 5 % vol. pour le pinot meunier par rapport aux prélèvements 3 jours plus tôt.
Sur la moyenne générale de la Champagne, le chardonnay a déjà atteint le minimum requis pour être vendangé (mais les disparités sont grandes d’une parcelle à l’autre !), le pinot noir et le pinot meunier doivent encore mûrir – mais c’est précisément dans les communes qui détiennent une majorité de ce cépage qu’ont été fixés les bans de vendange les plus tardifs. Autre caractéristique du millésime, le taux d’acidité est élevé, gage d’un bon vieillissement futur du champagne, mais à prendre en compte dans la mise en œuvre des processus fermentaires. Enfin, l’état sanitaire reste globalement satisfaisant et maîtrisé, même si les prévisions météorologiques des premiers jours d’octobre – peu froid la nuit, alternance de belles éclaircies et d’averses éparses – forment un cocktail moins favorable.
L’union des œnologues de Champagne a réuni ses membres mardi dernier pour les sensibiliser aux caractéristiques du millésime. En cette année tardive, consigne est donnée de ne pas se précipiter et de vendanger bien individuellement chaque parcelle en attendant l’optimum de la maturité, sauf en cas de dégradation sanitaire. Pour les vignerons, la gestion des équipes de coupeurs et la logistique de ramassage des parcelles seront donc un point-clé dans ce millésime de précision. L’accent est à nouveau porté sur le tri et la formation des vendangeurs – à la différence près que, cette année, il y a du raisin dans les vignes et que les rendements autorisés, assez faibles, vont permettre de faire du tri pour n’amener que le meilleur aux pressoirs. Autant d’éléments qui font affirmer à Dominique Moncomble, directeur du pôle viti-vinicole du CIVC, « tout est possible, y compris le meilleur », tordant le cou aux devins qui ont martelé dès cet été l’équation simpliste : vendanges tardives = mauvaises vendanges.
En revanche, l’extrême variation de maturité d’une parcelle à l’autre est une variable compliquée à maîtriser cette année, qui va peut-être se traduire en un étalement inhabituel des réceptions de vendanges. A Sermiers par exemple (majorité de pinot noirs et pinots meuniers) dans la Montagne de Reims, la cave coopérative va ouvrir ses portes et recevoir du raisin jeudi prochain, mais certains coopérateurs ont d’ores et déjà décidé de reporter au lundi suivant le début de leur cueillette.
Cette disparité reflète ce qui s’est produit au moment de la floraison. « Pour les parcelles de pinot meunier et de pinot noir précoces qui ont fleuri fin juin pendant les pluies, coulure et millerandage ont provoqué des grappes hétérogènes, des petites baies dont certaines ont éclaté lors des pluies de mi-septembre, et il ne faudra pas tarder pour les vendanger, explique Jean-Paul Gandon, chef de cave de Lanson. Et puis au contraire les floraisons de juillet, après les pluies, ont donné de belles grappes avec beaucoup de raisins. Là il faut au contraire attendre que cela mûrisse, car il y a beaucoup de volume. »
Véritable bibliothèque des millésimes et mémoire vivante de la Champagne, Jean-Paul Gandon compare cette année au millésime 1983. Un millésime qui a donné justement de très jolis champagnes qui tiennent encore bien la route. Tout est possible !
Joëlle W. Boisson
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