Dimanche 22 Décembre 2024
Olivier Cuvelier (photo archive Sud-Ouest)
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Date
21.09.2016
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En marge de la présentation de la Sélection Officielle des Crus Bourgeois du Médoc pour le millésime 2014 (278 vins retenus, un record à ce jour), le nouveau président de l’Alliance, Olivier Cuvelier, a reçu « Terre de Vins » pour détailler les chantiers qui l’attendent. En premier lieu la mise en place d’un classement, enfin validé à la majorité, d’ici 2020. Entretien.
Olivier Cuvelier, la grande actualité pour les Crus Bourgeois en cette rentrée, c’est la validation, à 78% des voix exprimées, du projet de Cahier des Charges du futur Classement des Crus Bourgeois du Médoc, après plusieurs tentatives avortées.
Cela fait plusieurs années que l’on travaille sur le sujet, il nous fallait deux-tiers des suffrages pour adopter le projet de classement, et ces 78% constituent une grande satisfaction. Avec du recul, je me dis que nous y sommes enfin parvenu car le projet était mieux élaboré, nous avons su séparer cahier des charges et plan de vérification, qui viendra dans un second temps et sera encadré par un organisme indépendant. On a su être à l’écoute, voir ce qui plaisait dans le projet ou quels étaient a contrario les points d’achoppement, on a beaucoup communiqué. Finalement les adhérents se sont largement mobilisés, 82% d’entre eux ont participé au vote.
Quelles sont les grandes lignes de ce Cahier des Charges ?
Chaque château va présenter un dossier d’éligibilité, qui permettra d’accéder aux trois différentes mentions : cru bourgeois, cru bourgeois supérieur ou cru bourgeois exceptionnel (les mentions historiques). Il faudra être volontaire pour prétendre à une mention spécifique, avec bien sûr des degrés d’exigence de plus en plus élevés selon la mention que l’on convoite. Tous les châteaux qui auront eu au moins cinq fois la reconnaissance « cru bourgeois » entre 2008 et 2015 pourront accéder au premier niveau. Pour aller plus haut, ou si l’on n’a pas eu cinq fois la reconnaissance en amont, il faudra passer par une dégustation d’au moins cinq millésimes en remontant jusqu’à n-7. Cela nous permet de juger les propriétés dans le temps, de mesurer l’évolution objective des vins. Une fois établi, le classement sera maintenu pour cinq ans, avec pour chaque propriété, au moins deux contrôles aléatoires durant cette période. Le premier classement sera établi en 2020 et portera sur le millésime 2017.
D’autres critères entrent-ils en ligne de compte – investissements, environnement ?
Bien sûr. Ces « critères complémentaires » sont très précis, ils vont des bonnes pratiques culturales en environnementales, sur lesquelles il faudra apporter des preuves concrètes, à la conduite de l’exploitation (traçabilité, détail du parcellaire, suivi de la vinification) en passant par la « mise en valeur du cru », avec des notions comme la qualité d’accueil du visiteur, la valorisation nationale et internationale de la marque… C’est le plan de vérification qui va définir l’importance de ces critères complémentaires, mais la dégustation restera l’élément primordial.
Avez-vous déjà défini des « quotas » pour les catégories « supérieur » et « exceptionnel » ?
Il n’y aura pas de Numerus Clausus. On a juste indiqué que l’on souhaiterait se diriger vers un classement pyramidal (historiquement, il y avait 9 crus bourgeois exceptionnels…), mais après ce n’est pas entre nos mains. Quant au nombre total de propriétés figurant au classement, je m’attends à voir revenir certains qui ne postulaient plus, et donc à voir le nombre total augmenter.
Le label Cru Bourgeois est aujourd’hui reconnu, mais il n’est pas toujours lisible pour le consommateur, avec des vins dont la qualité ou le prix peuvent se révéler disparates. L’instauration d’un classement va-t-elle remettre de l’ordre dans tout ça aux yeux des clients français et internationaux ?
Je le pense. Les Crus Bourgeois du Médoc, pour le millésime 2014 qui est présenté aujourd’hui, cela réunit 278 propriétés, 30 millions de bouteilles (un tiers de la production médocaine). C’est donc un tronc commun, avec un minimum de garantie qualitative, ce qui est rassurant pour le consommateur. Mais il est vrai que lorsqu’on monte en gamme, les clients peuvent y perdre leur latin. Le classement devrait permettre de mieux segmenter tout cela. Mais il est clair que l’on ne sera pas à l’abri de surprises ! Le premier classement devrait être un pavé dans la mare.
Qui dit « surprises » et qui dit « hiérarchie », dit mécontentement. Comme vous l’avez précisé, le cahier des charges a été validé à 78%, ce qui laisse 22% de contradicteurs potentiels, sans compter ceux qui se sont abstenus. Pensez-vous être bien « bordés » par rapport aux contestations éventuelles qui pourraient voir le jour ?
On a bien construit le cahier des charges, le plan de vérification sera bien encadré… On a essayé de tout anticiper pour ne pas tomber dans les erreurs du passé. Après, on sait tous que le droit français est très complexe, et il y aura peut-être toujours un biais pour attaquer le classement. Mais d’un autre côté je me dis que ce dernier ne sera là que pour cinq ans, et que les tentations seront donc moins fortes de le débouter.
Ce classement, c’est le grand chantier de votre début de mandat. Un mot sur le travail accompli par votre prédécesseur Frédéric de Luze (disparu en juillet dernier, NDLR) ?
Frédéric de Luze a tout d’abord eu le flair de donner un aspect très commercial à l’Alliance des Crus Bourgeois, d’impulser la conquête de nouveaux marchés – la Chine notamment – à travers des opérations promotionnelles. Cela tenait bien sûr à sa sensibilité de négociant. Mais sur ce projet de classement aussi, il est indéniable que nous poursuivons tout le travail qu’il avait conduit depuis des années.
Quels sont les autres grands chantiers qui vous attendent ?
Poursuivre les efforts promotionnels à l’international. Nos adhérents ont besoin de vendre du vin, nous ne sommes pas des Crus Classés, il faut se battre pour conquérir des marchés, et cela ne pourra réussir que collectivement (aucun d’entre nous n’a une « marque » individuelle plus forte que la mention Cru Bourgeois). L’Asie reste un marché prioritaire. Mais il y a aussi des parts à retrouver aux États-Unis, des places à consolider en Europe (je pense à l’Allemagne, où les consommateurs sont très attentifs au rapport qualité-prix), et bien sûr en France. On voit que notre sticker nous a donné une belle visibilité en grande distribution, il faut encore capitaliser là-dessus et redoubler d’effort pour combler le grand écart qui nous sépare des Crus Classés, sans forcément chercher à aller sur le terrain des marques, voire même des seconds vins, mais en jouant la carte collective.
Aujourd’hui, vous présentez le millésime 2014, comment sentez-vous l’attente des professionnels (dégustateurs, acheteurs) ?
Il est sûr qu’après un 2013 compliqué, 2014 apporte une bouffée d’air. Sa première qualité est d’être déjà un millésime qui se goûte déjà bien. On l’a comparé à 2008 mais à ce stade il est moins austère, plus équilibré, il est même selon moi plus flatteur que 2012, c’est l’exemple même du millésime « good value » qui est à même de séduire les consommateurs. L’affluence que l’on constate aujourd’hui en atteste.
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