Vendredi 22 Novembre 2024
Auteur
Date
03.03.2017
Partager
Rares sont les domaines qui peuvent se targuer de près de 50 ans en bio. Et pour cause, Maurice Combier s’est battu des les années 1960 pour faire reconnaître ce mode de viticulture en vallée du Rhône. Son fils Laurent perpétue cette philosophie.
Camille Combier, grand-père de Laurent, polyculteur et éleveur, est descendu d’Ardèche dans les années 1930 pour acheter une propriété en vallée du Rhone, à La Roche-de-Glun, et y faire des abricotiers et de la vigne. Après la guerre, le paysan vigneron commence à vendre son vin en cubi autour de chez lui et en 1952, il plante sur un mamelon caillouteux le Clos des Grives, tout en syrah en sélection massale d’Hermitage. Le sol argilo-calcaire, entre éboulis de l’Isère et le Rhône et ses galets roulés, apporte de la finesse aux tanins, tout en dentelles. En 1962, il est exproprié de sa cave pour la construction du canal du Rhône et part s’installer à Pont d’Isère. Il vend des raisins à Jaboulet et à la cave de Tain l’Ermitage. À l’époque, il mise surtout sur l’arboriculture plus rémunératrice que la vigne. Son fils Maurice, qui le rejoint sur son activité au début des années 60, est un visionnaire avec une autre approche de l’agriculture. Il se lance dans le bio pour la vigne comme pour les arbres. « Mon père passait pour le fou du coin, avoue Laurent Combier. Les voisins persuadés qu’il ne tiendrait pas, s’imaginaient déjà se partager la propriété mais il a persévéré et finalement ce sont les techniciens de la chambre d’agriculture qui ont défilé chez lui pour plancher sur une reconnaissance officielle du bio. L’obtention du logo en 1981 au bout de 15 ans de bataille a été un moment fort pour lui ».
Un sol vivant et un style
Laurent arrive à la fin des années 80, juste avant la construction de la nouvelle cave. « C’est un beau métier tellement riche; il faut être à l’écoute de la terre et de la nature, et vinifier comme un chef cuisinier pour affirmer un style tout en n’oubliant pas d’être un commerçant. Mais à l’époque, il faut reconnaître que les vins bios n’étaient pas toujours bons, le logo AB est un résultat de moyen pas de qualité. Si un sol vivant est indispensable pour obtenir un meilleur raisin et exprimer le meilleur du terroir, il faut ensuite avoir le bon outil pour le transformer en respectant la matière première. Plus de 60% vient du vignoble, et le reste tient de la vinification ». Laurent a travaillé 25 ans avec son père, disparu il y a deux ans. Le domaine qui est passé de 5 à 50 ha en 25 ans, est toujours en bio et travaillé selon les principes de biodynamie, « un prolongement logique de la démarche, mais avec cette taille, difficile de revendiquer la certification. La réflexion permet néanmoins de mieux comprendre son vignoble et on le retrouve dans les vins avec une plus grande perception des arômes et des tanins plus harmonieux ».
Un trio Infernal en Priorat
Le domaine Combier produit quatre cuvées domaine et le Clos des Grives. Les jeunes vignes servent à l’élaboration de la cuvée Laurent Combier avec un élevage en œuf béton pour des tanins plus polissés. Outre 6 ha supplémentaires sur le nord de l’appellation, rachetés en 2010 (la cave Bégot), Laurent Combier, a étendu son vignoble en 2002… dans le Priorat en Espagne avec deux compères de longue date, Jean-Michel Gérin (Domaine Gérin) et Peter Fischer (Révelette). « C’était une opportunité, le terroir entre 300 et 600 m d’altitude nous a plu et c’est un domaine facile d’accès. Il faut reconnaître qu’il est plus facile de faire du bio en Espagne grâce à une faible pluviométrie, même si en vallée du Rhône, on a un atout non négligeable, le VDN – traduire le Vent Du Nord, le mistral ». Le trio a trouvé pour son domaine Infernal un chef de culture catalan, Pep Aguilar, qui suit au quotidien les 6,5 ha en production, surtout en rouge avec grenache, carignan et syrah, un blanc à base de macabeu et grenache blanc. « Pour élaborer les cuvées, on discute beaucoup entre nous – on y va toujours une dizaine de fois par an – et quand on n’arrive pas à se mettre d’accord, c’est Pep qui décide » conclut Laurent Combier.
Avec l’arrivée de la nouvelle génération, Julien et David, le domaine prévoit en 2017 l’agrandissement de la cave et l’acquisition de nouvelles parcelles en Crozes-Hermitage avec un programme de mise en place de haies et de zones de biodiversité.
Articles liés