Vendredi 22 Novembre 2024
Sylvie Busca (Caves Legrand)
Auteur
Date
28.03.2017
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L’événement « Cavistes Dating », qui se déroulait hier au Cercle National des Armées à Paris, était l’occasion de donner un coup de projecteur sur les femmes qui pratiquent ce beau métier de caviste. Témoignages (entre deux dégustations).
Dans un monde du vin qui se féminise de plus en plus mais dont les places « dominantes » restent bien souvent trustées par les hommes, il est plus que jamais important de mettre en avant le rôle des femmes – à la vigne comme au chai, à la dégustation comme dans le journalisme, dans le sommellerie comme chez les… cavistes. L’organisation de la première édition de « Cavistes Dating » hier par « Terre de Vins » à Paris (40 cavistes de toute la France rencontraient 66 propriétés en mode speed dating) a permis de donner la parole à quelques femmes qui consacrent chaque jour leur énergie et leur savoir à mettre en avant les vins des autres. Les vins qu’elles aiment.
« Trouver sa place »
Amélie Mercier, de la cave Cuvelier & Fauvarque à Lille, insiste sur son rôle de « sommelière-caviste ». « C’est à la fois un métier axé sur le conseil, l’écoute, l’accompagnement, mais qui reste très physique, il faut bouger des caisses de vin, gérer des stocks… Je ne vais pas vous mentir, cela reste parfois compliqué pour une femme de trouver du travail dans ce monde du vin, certains stéréotypes ont la vie dure. Mais je pense que c’est plus une question de génération, en réalité. Tout cela va se lisser. Il y a encore des clients qui vous prennent de haut quand ils viennent acheter du vin, mais n’oublions pas que de plus en plus d’acheteurs de vin sont des femmes ! Elles sont de plus en plus prescriptrices… Quant à savoir si les femmes dégustent différemment ou un palais plus affûté que les hommes, je n’irai pas jusque-là. Je sais juste que je suis une femme, que j’ai une certaine sensibilité, très affirmée, et que cela influe forcément sur ma façon de déguster ». Pour Noémie Lavigne, qui représentait la Vinothèque de Bordeaux, « le vin reste un monde résolument masculin et il faut y trouver sa place quand on est une femme ; mais j’ai la chance de travailler dans une équipe très féminine, et qui plus est une entreprise familiale (2000 références de vin) dirigée par trois frères et une sœur. Donc la place des femmes n’y est pas vraiment un sujet ».
Entre deux dégustation, Marie-Dominique Bradford, fondatrice de la société Trois Fois Vin en 2008 (un site de vente en ligne avec un système de box par abonnement et une cave physique à Paris, 12 000 clients réguliers, 350 références), « peu importe que l’on soit homme ou femme : dans ce métier il faut avant tout savoir raconter des histoires et faire voyager les clients, affirme ses goûts, avoir l’esprit toujours en alerte pour dénicher des pépites – bravo d’ailleurs à « Cavistes Dating » de nous permettre de faire de belles rencontres avec des vignerons. Il est certain que nous ne sommes pas nombreuses, nous les femmes, à tenir ce rôle de prescriptrices. Mais moi aussi je pense qu’il s’agit d’une question de génération, et les choses vont évoluer, nécessairement ».
« Le sens de l’Histoire »
Sylvie Busca (photo ci-dessus), directrice depuis un an des Caves Legrand à Paris, une institution née en 1880, travaille depuis 20 ans dans le monde du vin. Elle a fait ses classes à Bordeaux, puis à Madiran chez Alain Brumont, avant de rejoindre les Caves Legrand il y a sept ans. Après une quinzaine de rendez-vous dans la journée de « Cavistes Dating », elle témoigne. « Je ne suis pas née dans le milieu du vin, je m’y suis intégrée, par passion. Je n’ai jamais été réellement confrontée au sexisme, plus souvent à une forme de paternalisme… Être une femme dans ce métier demande peut-être de faire davantage ses preuves, de montrer qu’on est aussi douée et capable qu’un homme, mais sincèrement, dans l’entreprise où je travaille où Francine Legrand a joué un rôle si important, la place des femmes ne se questionne même pas. Ce que je constate c’est que notre métier se féminise de plus en plus, et c’est le sens de l’histoire ».
Même impression pour Valérie Lecomte-Anterrieu, qui gère la Boutique des Vins et la Boutique des Saveurs à Toulouse créées en 1982 et 1998. Mais vécu un peu différent : « quand il y a 25 ans j’ai commencé à travailler avec mon père, je n’étais pas ‘crédible’ en tant que femme. Il a fallu que je bosse dur pour acquérir ma légitimité, pour montrer que je suis tout à fait à ma place en tant que caviste. Aujourd’hui cela n’est plus un sujet. Je gère 3000 références, des vins du Sud-Ouest mais aussi de toute la France, j’essaie d’inciter les Toulousains à ne pas boire systématiquement QUE des vins du Languedoc, bien que j’adore ça (rires). C’est pour cela que le format de « Cavistes Dating » est très intéressant, il privilégie la découverte et l’échange. Aujourd’hui je n’ai plus de souci en tant que femme et si je décèle un peu de paternalisme ou si un client me prend de haut, je peux vous dire qu’il est bien reçu ! Quant au goût… Je ne sais pas s’il existe un palais féminin, peut-être une sensibilité différente. Ce qui est certain c’est qu’en tant que femme, que l’on soit caviste ou consommatrice, on a sans doute une approche plus ‘désacralisée’ du vin, plus ludique, plus axée sur le plaisir et le ‘j’aime / j’aime pas’. N’oublions pas qu’aujourd’hui plus de 50% des clients sont des clientes. Les générations évoluent ».
Et puisqu’il s’agit de saluer la place des femmes, un grand bravo à Laura Bernaulte, journaliste à la rédaction de « Terre de Vins » et grande amie des cavistes, qui a joué un rôle crucial dans la bonne organisation de cet événement !
Retrouvez les temps forts de « Cavistes Dating » demain en images sur notre site.
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