Vendredi 27 Décembre 2024
(Photo Vignobles Ducourt)
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26.02.2018
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Tout près des vignobles des Côtes de Blaye, une petite entreprise de Charente-Maritime vient de découvrir fortuitement une solution 100% naturelle qui, selon elle, protège les vignes du gel.
Homéopathie et aspirine naturelle, c’est peut-être la solution qui permettra aux vignerons de vaincre ce fléau qui a ravagé l’an dernier des centaines d’hectares du Bordelais et causé des millions d’euros de pertes.
Au village de Bussac-Forêt, tout au sud de la Charente-Maritime, Bernard Lachaise, ingénieur agronome, dirige depuis 17 ans Gétade Environnement, avec deux employés et sa femme Annie à la comptabilité. Il a déjà mis sur le marché français une petite vingtaine de produits phytosanitaires bio, dont le MO2, aux vertus antigel découvertes fortuitement l’année dernière.
Le MO2, c’est pour mildiou et oïdium, deux maladies de la vigne que le produit traitait, avec comme adjuvant de l’aspirine végétale, tirée du saule blanc et de la reine des prés, pour fluidifier la sève.
Au printemps 2016, Hervé Emeric venait d’en pulvériser ses vignes dans le Vaucluse quand le gel a frappé: « Les feuilles ont brûlé. Normalement, quand ça gèle, on ne fait que du bois, on n’a pas de fruit. Pourtant, le raisin a poussé normalement, après », raconte-t-il à l’AFP.
A Saint-Antonin-du-Var, en Provence, Patrice Giraud a fait le même constat : « Fin avril, j’ai fait venir un expert d’assurance qui a estimé que 75% de la parcelle avait gelé. Quand il est revenu mi-août, il ne l’a pas reconnue parce que le feuillage et les grappes étaient comme s’il ne s’était rien passé ».
Cela a été le déclic pour Bernard Lachaise, qui raconte avoir fait trente ans de recherche appliquée pour maîtriser les principes fondamentaux de l’homéopathie sur la santé animale, et les avoir transposés au végétal, pour que la plante se défende elle-même.
« Un robinet d’eau ouvert »
« L’homéopathie, c’est prélever le poison pour formuler l’antidote. Cela n’a pas qu’un effet placebo », assure ce quinquagénaire, vêtu de sa blouse grise frappée au logo de son entreprise.
Couplée à l’aspirine végétale, qui est connue depuis l’Antiquité, ce traitement « a le même effet sur la sève que l’aspirine sur le sang. Ça la fluidifie, ce qui l’empêche de geler. C’est comme un robinet d’eau qu’on laisse ouvert, il ne gèle pas », assure-t-il.
Les prescriptions sont simples : lorsque le vigneron voit qu’une gelée va poindre, il vaporise ses vignes avec ce traitement naturel.
Bernard Lachaise a peaufiné les prescriptions de son produit antigel. Il faut, préconise-t-il, pulvériser la nuit ou tôt le matin, quand les feuilles sont humides, un traitement dont les dosages varient selon le degré d’avancement de la vigne, qu’elle en soit au stade des « pointes vertes », des « grappes visibles » ou en phase végétative.
Attention, dit-il, le traitement fonctionne mieux sur un sol équilibré. « Les maladies vont sur des organismes qui sont déséquilibrés par des carences ou bien saturés par des éléments. Or un sol trop acide ou trop basique modifie la physiologie de la plante et la fragilise », explique-t-il. « Donc il faut d’abord rééquilibrer le sol par amendement naturel. Cela attire les vers de terre, qui aèrent la terre. Ensuite on peut appliquer un traitement sanitaire préventif. Mais en équilibrant le sol, j’élimine 60% des besoins en produits phytosanitaires, car la plante est alors capable de se défendre elle-même », insiste-t-il.
Aujourd’hui, son chiffre d’affaires tourne autour des 800.000 euros mais il mise sur son produit pour lequel il dit négocier avec une multinationale européenne afin de le commercialiser à grande échelle.
En attendant, il fait construire de nouveaux locaux de 1.800 m2, quatre fois plus grands qu’aujourd’hui.
Par Olivier Guerin pour AFP
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