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[Wine Paris] Ce n’est qu’un au revoir avec les filles du nord

Annick et sa fille Marlène, domaine Tinel-Blondelet (photo JC Gutner)

Auteur

Pauline
Gonnet

Date

13.02.2019

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Wine Paris se termine et a été l’occasion de faire de nombreuses et belles découvertes. Et parce que le cercle « Femmes de vin » a dix ans cette année et qu’il l’a dignement fêté lors d’une soirée de dégustation en off, mais aussi parce que les vigneronnes sont de plus en plus nombreuses (plus de 200 domaines aujourd’hui présentes dans le cercle contre quelques unes il y a dix ans), nous avions envie de clore ces trois jours en trinquant avec des vins de filles, et spécialement des filles du nord pour cette année.

Une alsacienne, une ligérienne, une beaujolaise et une bourguignonne : lumière sur quatre filles qui nous ont charmés et fait vibrer.

Domaine Schmitt-Carrer : une transmission père-fille réussie
Anne-Cécile Carrer-Hattermann, du domaine Schmitt-Carrer situé dans le Haut-Rhin à Kientzheim nous a fait voyager avec tous les cépages alsaciens, répartis sur deux gammes et des terroirs différents. Un très joli riesling dit d’entrée de gamme séduit d’entrée de jeu : pour 9€ en prix domaine, le rapport prix/plaisir est top pour ce riesling présentant un ravissant côté fleuri. Anne-Cécile a repris les rênes de la vinification et du travail à la vigne, mais son père ne reste jamais loin en cas de besoin, et il fait partie de ceux qui n’ont rien contre la reprise du domaine par leur fille, au contraire : de son propre aveu, « les femmes ont un nez globalement plus développé que le nôtre, et en plus de cela, elles sont aussi plus exigeantes et pousseront la qualité plus loin, aboutissant souvent à des vins plus précis ». Loin de nous comme de Roland Carrer l’idée de relancer une guerre des sexes sans fondements, car nombre d’hommes travaillent aussi selon ces axes-là, mais ce constat sur l’approche féminine est malgré tout assez répandu, toutes régions confondues.
Dernier coup de cœur chez Anne-Cécile : sa cuvée « Pinot Noir fût de chêne » 2017, en bio comme tous les autres vins du domaine et vinifiée pour la première fois en nature, absolument sans soufre : une réussite aromatique et structurelle : le fruit explose autant que la structure est structurée et veloutée, à nouveau un excellent rapport prix/plaisir à 18,50€.

Domaine Tinel-Blondelet : le sauvignon à l’apogée
Cap à l’ouest au domaine Tinel-Blondelet (photo), où mère et fille magnifient le sauvignon à Sancerre et à Pouilly-Fumé. Annick (Blondelet) a géré le domaine avec son mari (Monsieur Tinel) avant de travailler aujourd’hui avec sa fille Marlène, elle-même jeune maman, qui s’occupe plus de la partie commerciale et administrative, tandis que sa mère gère les vignes et la vinification.
Un Sancerre et trois Pouilly-Fumé pour quatre expressions vibrantes du sauvignon. Le Sancerre « Frétoy » fait exploser le citron sur une minéralité tendue mais avec des rondeurs, dûe notamment à l’élevage sur lies fines, « signature de la maison » sur toutes les cuvées. Une mise en bouche déjà réjouissante, avant d’enchaîner sur les Pouilly « Génetin », souple et ample mais toujours très droit, et le Pouilly « Arrêt Buffatte », et terminée par la très belle cuvée « Quercus », où le mix d’élevage en cuve et en fût (dont des neufs, un vin et deux vins) livre un sauvignon rond, tendre, tendu, long, vibrant, où les agrumes s’en donnent à cœur joie. Si cette cuvée culmine à 27€, elle les vaut largement, et les autres sont en moyenne à 15,50€, pour un rapport prix/plaisir imbattable.

Domaine Laura Lardy : le gamay au naturel
Fille de Lucien, sœur de Yohan, bref, issue d’une famille vigneronne, elle a bien essayé de faire autre chose mais le sort l’a rattrapée en 2015, et son premier millésime a vu le jour en 2017, et pour une première, c’est franchement prometteur.
Convaincue depuis le début de la plus-value de travailler ses vins en nature, sans sacrifier ni la précision ni la pureté, elle réalise en 2017 un Fleurie, Moulin-à-Vent, Chénas et Morgon hyper croquants et dotés d’une forte personnalité. Subtils, fins mais puissants, ils mériteraient presque d’être attendus encore un ou deux ans, pour que les tanins se posent et laissent la place aux jolis arômes de petits fruits rouges et à la vivacité du gamay. Le Morgon « Côte du Py » est déjà prêt à boire, avec son mélange d’élevage en cuve et fût, avec ses arômes typiques de cerise noire et sa bouche plus veloutée que ses voisins, s’étirant sur une longueur dominée par la groseille très gourmande (Morgon : 24€ ; Fleurie « Les Côtes », Moulin-à-Vent « Le Mont » et Chénas « La Fayarde » : 17€).

Domaine Feuillat-Juillot : totalement sous le charme de Montagny
A celles et ceux qui se désespèrent de bien boire en Bourgogne pour un prix raisonnable, le domaine Feuillat-Juillot est de nature à remonter le moral de tous les sceptiques.
Camille est arrivée sur le domaine en 2016 pour rejoindre sa mère Françoise, elle-même fille de viticulteurs qui a acheté le domaine en 2004, après avoir travaillé des années en association avec le propriétaire du domaine. Mère et fille exploitent 15 hectares aujourd’hui, et produisent sept cuvées en blanc (Montagny étant une appellation produisant exclusivement du blanc), qui sont toutes exquises, chacune à leur manière.
De la cuvée « Camille », vive et délicate en Montagny Villages (12,20€), à la cuvée « Louis », issue d’un premier cru (Mont-Cuchot) et du nom du troisième enfant de Françoise, charnue mais tendue, vive et ronde, très aromatique et surtout au prix de 28€ : impossible de ne pas tomber sous le charme de ce domaine.
Les cuvées « Victor » (25€), « Les Coères » (21€), et « Les Grappes d’or » (17,20€)sont également ultra plaisantes, avec des expressions de chardonnay différentes mais toujours dans la précision, la pureté et la richesse aromatique.