Dimanche 22 Décembre 2024
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05.03.2021
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Réchauffement climatique oblige, la Bourgogne songe à remettre en question la domination (presque) sans partage du chardonnay et du pinot noir. Fin février, l’interprofession a réuni deux chercheurs afin d’évoquer le sujet. Si personne ne souhaite se précipiter, toutes les options sont sur la table.
La Bourgogne sans pinot ni chardonnay, peut-on seulement y songer ? « Il n’est pas question de les faire disparaître du jour au lendemain », tempère d’emblée Jean-Michel Boursiquot. L’ampélographe (spécialiste des cépages) donnait une conférence avec Laurent Audeguin, de l’Institut français de la vigne, jeudi 25 février à l’occasion de Vinosphère, événement organisé par l’interprofession bourguignonne.
Face au dérèglement climatique, les cépages-rois de Bourgogne peuvent connaître des difficultés. Dans une région réputée pour la délicatesse de ses vins, surmaturité et chute des acidités sont aujourd’hui surveillées de près par les vignerons. Sans parler des accidents climatiques, comme la sécheresse de 2020. Certains craignent une impasse technique à moyen terme.
La piste de l’adaptation
Alors, faut-il tout changer ? Pas encore. « La première piste est d’exploiter au mieux la variabilité naturelle qu’offrent pinot et chardonnay », propose Laurent Audeguin. « Nous menons des travaux avec les organismes locaux pour conserver la diversité de ces cépages. Dans de vieilles parcelles, il y a peut-être des individus qui offrent des maturités plus tardives, une accumulation de sucre inférieure, plus d’acidité… »
Un espoir qui n’empêche pas les chercheurs de prendre très au sérieux la piste des nouveaux cépages. Jean-Michel Boursiquot propose d’abord de renouer avec les variétés « oubliées » de Bourgogne. « En blanc, on peut citer le roublot, qui est un descendant du pinot. En rouge, il y aurait le tressot, l’enfariné noir ou encore le franc noir de l’Yonne ». Du côté des régions voisines, « le savagnin du Jura est une très grande variété en terme de qualité et d’équilibre. En rouge, on pourrait imaginer que la syrah remonte dans le nord. »
Les cépages de Grèce et d’Italie à la rescousse
Et pourquoi pas des variétés étrangères ? « En Grèce, on peut signaler l’assyrtiko, de l’île de Santorin. Son équilibre est comparable à celui du chardonnay, et son acidité se maintient dans des zones très chaudes. En Italie, le nebbiolo pourrait être intéressant à tester, son profil pourrait être complémentaire à celui du pinot. »
Mais la vigne est affaire de temps long, et il ne faut pas imaginer une révolution. « Ça va commencer par des essais, sur quelques parcelles, pour essayer d’apporter des solutions de complémentarité, qui pourraient être utilisées dans les cas de millésimes difficiles. » D’ailleurs l’Inao, institut chargé de l’encadrement des appellations, n’autorise ces expérimentations en AOC que dans une limite de 5% des surfaces. Le Montrachet planté en Savagnin, ou un Musigny 100% Nebbiolo, ce n’est pas pour demain.
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