Jeudi 27 Février 2025
Le Cellier de Princes ©DR
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27.02.2025
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Nombreuses sont les caves coopératives à célébrer leur centenaire cette année. L’occasion de se pencher sur un modèle fragilisé par la conjoncture économique qui fait preuve de résilience tout en prônant ses valeurs de solidarité. Exemple avec le Cellier des Princes, seule cave coopérative sur l’AOC Châteauneuf-du-pape.
A la fin du 19ème siècle, la viticulture traverse une crise profonde, méventes, baisse des prix, vignobles dévastés par le phylloxéra, exode rural du à la guerre. Un mouvement vigneron se créé et les premières caves coopératives voient le jour. D’abord en Alsace, à Ribeauvillé, puis en Champagne. Le 23 décembre 1901, les statuts de la cave de Maraussan (Hérault) entérine la création de la première coopérative vinicole, qui se donne pour devise « Tous pour chacun - Chacun pour tous » et qui est à l’origine du mouvement des «Vignerons Libres ». L’essor date des années 1930. De 82 caves, on passe à 827 entre les deux guerres, avant de se stabiliser dans les années 1970.
C’est donc en 1925, que née la coopérative vinicole courthézonnaise. Elle prendra le nom de Cellier des Princes, en référence aux Princes d’Orange, en 1960. Deux ans plus tard, la cave s’installe le long de la Nationale 7. Elle y ouvrira quelques années plus tard son caveau de vente directe, profitant d’un emplacement stratégique sur cette route mythique des vacances. La première sélection parcellaire et l’élaboration du cahier des charges pour les viticulteurs arrivent en 1998. Le premier tournant est effectif en 2005 avec une stratégie qui mise sur la vente en bouteilles. La seule cave coopérative sur l’aire d’AOC Châteauneuf-du-pape, fournit alors 500 000 bouteilles, sous sa marque Cellier des Princes et avec nom de domaine. Le second virage arrive en 2016 avec l’acquisition des 10 hectares du domaine Les Escondudes, en Châteauneuf-du-pape, qui seront donnés en fermage à dix jeunes viticulteurs. Le Cellier compte désormais 130 apporteurs, pour 630 hectares. Il vend 2 millions de bouteilles dans 40 pays sur les cinq continents, correspondant à 60 % de son chiffre d’affaire.
« Fort de reconnaissances qualitatives, aux concours internationaux ou aux notes des plus grands dégustateurs mondiaux, il nous a semblé assez naturel d’élargir notre panel d’offres tout en continuant à maîtriser notre production sur l’ensemble des crus de la vallée du Rhône méridionale. On a eu la chance d’être rejoint par de nombreux vignerons sur les crus Cairanne, Gigondas, Rasteau, Vacqueyras, qui nous permettent d’asseoir une production conséquente et qualitative, à la fois sur des domaines et sur la marque ». Pierre Cohen, le directeur, mise sur le recrutement de nouveaux viticulteurs. Il n’omet pas de dire que la rémunération de 30 à 40 % au dessus du marché, selon le cahier des charges, explique cette dynamique.
La bonne santé du Cellier des Princes est due à une stratégie de conquête et d’entreprise. L’arrivée des crus va de paire avec l’objectif d’avoir une gamme premium. « Une distribution équilibrée permet de regarder l’avenir avec sécurité », assure le directeur. Il peut s’appuyer également sur l’identité, l’image et la renommée de l’AOC Châteauneuf-du-pape. Ainsi, la gamme Signature développe des vins « haute couture » misant sur la notion de terroirs vendus au caveau et en CHR. Ce secteur est d’ailleurs une cible pour la coopérative, « afin d’affermir nos positions. Il y a un potentiel de croissance grâce aux médailles que nous récoltons chaque année », souligne Pierre Cohen. La gamme Cellier des Princes se veut « l’incarnation du savoir-faire et de l’excellence de la cave ». Domaine & Châteaux signe les vins des domaines appartenant aux viticulteurs. Enfin, Art & Tendance mise sur des vins faciles à boire destinés à un public jeune. De 4 à 50€, c’est un large panel qui se déploie sur la vallée du Rhône.
Le Cellier des Princes s’inscrit dans une démarche RSE qui tend à la préservation et la durabilité du vignoble. Dans le cadre des actions environnementales, panneaux photovoltaïques, tri des déchets ont été mis en place. La cave est certifiée IFS/BRC, HVE et AB pour un domaine. Autant d’aspects qui éclairent les valeurs de coopération, de solidarité et de durabilité.
De nombreuses animations vont émailler l’année 2025. Outre les afterwork, les jeudis gourmands, la fête de la vigne et du vin et autres foires au vin, deux soirées spéciales 100 ans se dérouleront les 11 juillet et 8 août.
Une cuvée qui surfe sur les codes de Châteauneuf avec sa bouteille armoriée et son étiquette avec blason et typographie « old school ». Le leurre marketing n’empêche pas la véritable qualité du vin. Localisés sur des terroirs autour de Châteauneuf du Pape, les grenaches (70%), syrahs, caladocs et carignans (30%) ont été égrappés, puis cuvés de 6 à 10 jours en cuve inox avec remontages. Après 9 mois en cuve béton, ils ont patienté 3 mois en bouteilles. Le nez subtil fleure bon fruits rouges et garrigue. La bouche est un vrai plaisir entre attaque acidulée, finesse des tanins, rondeur, épices douces, olive noire. Nous sommes bluffés !
Une cuvée créée par les œnologues Philippe Cambie et Thierry Ferlay. 95 % de grenaches centenaires et 5 % de mourvèdres, à petits rendements, sont issus d’une sélection de parcelles en coteaux où affleurent galets roulés de quartzites sur un sous sol d'argile rouge. Après une vendange manuelle, un égrappage sélectif, la cuvaison est de 35 jours avec des délestages et remontages journaliers. L’élevage dure 12 mois en demi-muids de chêne français puis plusieurs mois en bouteilles. Après oxygénation, le nez est encore dominé par les fruits rouges. En bouche, le registre est plus sur les baies noires, le café et le cacao se mêlent dans un univers torréfié. De jolis tanins enrobent la matière où l’alcool est bien maîtrisé. A garder !
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