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[BORDEAUX TASTING] Château Branaire-Ducru, le nouveau visage

Auteur

Jean-Charles
Chapuzet

Date

15.12.2018

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Il y a un peu plus d’un an, Patrick Maroteaux s’en allait, laissant l’image d’un propriétaire serein autant que discret et d’un entreprenant Président de l’Union des Grands Crus de Bordeaux épris du collectif.

Plus tôt que prévu – s’il était prévu, son fils François-Xavier est revenu au Château Branaire-Ducru pour prendre les commandes de ce 4ème Grand Cru Classé 1855. Se destinait-il à ces responsabilités ? Comment marche-t-on dans les pas de son père ? Quelle route trace-t-il pour ce bijou de Saint-Julien ? En somme, Terre de Vins souhaite savoir ce que Branaire a désormais dans le ventre.

Un parcours pur sucre

« Je suis de 1983, un millésime avec des bonnes choses un peu partout », sourit d’emblée François-Xavier qui fut à la bonne école avec son père pour découvrir des vins de toutes les régions viticoles de France et du monde. Les Maroteaux sont des amateurs sans pour autant avoir baigné dans le vin. L’origine, c’est le sucre, entre Orléans et Etampes. Ils ne lâcheront jamais le village de Toury où il y a toujours la maison de famille. Depuis 1874, la branche maternelle de François-Xavier y exploite la betterave. Au XXème, deux groupes se partagent l’industrie sucrière, Beghin Say et Daddy. Les futurs propriétaires de Branaire-Ducru travaillent pour le second groupe. Le père de François-Xavier, après un parcours dans la banque, s’occupe de ce business, vend la société en 1993 mais prend la présidence du groupe Daddy. Entre-temps, il assouvit sa passion pour le vin en achetant en 1988 le Château Branaire-Ducru. « Au départ, il ne venait que le vendredi pour gérer ce domaine et puis en 2000, il a pris la décision de cesser toute activité dans le sucre pour venir s’occuper du Château, mes parents ont même emménagé sur place », explique François-Xavier qui pendant ce temps opte pour des études dans la finance. Ce sera Dauphine. Le jeune homme a un cerveau bien fait tout comme son frère et ses deux sœurs.

Quand François-Xavier goûte de la vie parisienne, il regarde d’un œil amateur ce qui se fait à Saint-Julien. « J’aime déjà le vin mais sans me projeter professionnellement, mes parents sont encore jeunes, je me dirige vers la banque, comme mon père à ses débuts », explique François-Xavier. Ce sera le CIC. Pas au guichet mais dans la finance, plus précisément l’investissement. Et puis, dans l’hypothèse que ce soit lui qui revienne à Branaire, François-Xavier quitte la banque pour travailler dans l’univers des vins et des spiritueux. Ce sera LVMH. Nous sommes en 2011. Le week-end, à Branaire ou Torcy, on tape dans la cave de Patrick qui est riche d’une grande diversité. Il y a beaucoup de médocs mais aussi de la rive droite, du Gazin, du Clos Fourtet, du Pavie, Canon-la-Gaffelière, Valandraud… Beaucoup de bourgognes aussi, du Rhône (Clos de Papes, Chave, Jamet, Gonon…), la Bégude et Vannières à Bandol, et naturellement plein de vins de Loire, du Clos Rougeard, Mellot, Cotat, Huet, Foreau… C’est du lourd. Pas besoin de conseils pour le choix des vins du mariage d’autant que François–Xavier et sa future épouse s’offrent un tour du monde avec quelques visites de vignobles. L’union s’officialise en 2009.

Duluc, un second vin de premier plan

Pour Branaire, toujours aucun plan concret sur la comète car Patrick entend travailler jusqu’à 70 ans, c’est-à-dire passer la main en 2020. Des soucis de santé bousculent les plannings à la fin de l’année 2014. « On évoquait mon retour mais c’est vraiment à ce moment qu’on a pris la décision », souligne François-Xavier qui démissionne alors en 2015 de LVMH. Il fait ses armes durant la semaine des Primeurs et emménage à Bordeaux avec son épouse et ses deux enfants – un troisième est venu s’ajouter à la fratrie. A Branaire, Patrick Maroteaux a un bras droit sur la toute la partie technique, Jean-Dominique Videau (depuis 2003). « On sait qu’on peut partir en voyage, on a une totale confiance, il s’occupe de la technique mais participe aussi à la représentation de Branaire », explique FXM. Ce 4ème Grand Cru Classé 1855 compte une soixantaine d’hectares ainsi que quelques hectares en Haut-Médoc. Comme son père avant lui, François-Xavier prête une attention particulière au second vin, Duluc de Branaire-Ducru, réputé pour sa qualité et sa garde. « Mon père l’a créé à son arrivée en 1988, on tient à en faire un vin à part », insiste FX. Sur les quinze derniers millésimes, 40% du vignoble produit Duluc. Pour le premier, fidèle à Saint-Julien, la signature de Branaire-Ducru est l’équilibre, la suavité et la profondeur. 100% passe par la Place de Bordeaux avec un marché très éparse sur le globe (30% en Chine, 25% en France, 30% en Europe et le reste aux US et au Japon).

Intra-muros, il n’y a rien à vendre à Saint-Julien donc il n’y a pas de projet d’extension dans l’immédiat. « On se concentre sur Branaire, il y a déjà beaucoup de choses à faire », reconnaît le propriétaire. En termes de conduite du vignoble, le Château Branaire-Ducru ne sera pas le premier Saint-Julien labellisé bio (Seul Gruaud-Larose l’a annoncé). « On tend vers la pratique la plus intelligente possible en mesurant le risque, le bio est une réflexion mais pas une voie unique », explique Jean-Dominique Videau. « De manière assez simple, on ne veut pas rentrer dans un système qui contraint, le meilleur exemple est le millésime 2018 où la pression de la maladie fut importante », ajoute François-Xavier qui privilégie l’évolution à la révolution. Et comme son père, il joue la carte du collectif en étant devenu président de l’AOC Saint-Julien au mois de juillet de l’année 2017. On ne change pas une philosophie qui gagne.

Le château Branaire-Ducru vous donne rendez-vous à Bordeaux Tasting les 15 et 16 décembre, stand A4.