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Carole Frelin, la relève pour répondre à la reprise

Carole Frelin sur le salon Millésime Bio

Carole Frelin ©F.Hermine

Auteur

Frédérique
Hermine

Date

29.01.2025

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Elle a rejoint en 2019 son père Jacques Frelin, l’un des piliers du salon Millésime Bio et fondateur de l’activité de négoce qui porte son nom, spécialisée dans les vins bio du Languedoc. Désormais directrice générale du groupe, Carole Frelin a pris ses marques, fait évoluer les gammes, internalisé communication et marketing pour mieux affronter un marché désormais piloté par l'offre.

Comment se porte le marché du bio aujourd’hui ?

Le marché du bio va mieux qu’en 2022-2023. On peut dire que 2024 est une année de reprise : on a retrouvé des consommateurs qui avaient levé le pied après le Covid, rattrapés par la crise. Et on en a gagné de nouveaux, soucieux de mieux manger et boire. Les paniers moyens ont augmenté, pas en prix mais en nombre de produits. Mais ce n’est pas une courbe exponentielle, plutôt une progression douce, en dents de scie selon les mois, sans avoir de réelles explications.

Avant la crise sanitaire, la demande était plus importante que l’offre. Est-ce toujours le cas ?

C'était en effet le cas en 2020 ; aujourd’hui, c’est l’inverse, même si l'on constate un ralentissement des conversions. En Languedoc, les nouvelles installations se font pourtant le plus souvent en bio, par sensibilisation et par conviction et parce que chez nous, le climat est sans doute plus facile que dans le Sud-Ouest par exemple. Mais actuellement, du vrac reste disponible sur le marché d’une année sur l’autre, surtout en vins rouges qui continuent à baisser dans un contexte de déconsommation. Mais le vin progresse plus que le bio en général, car les consommateurs ont besoin de se faire plaisir.

Est-ce que le style des vins a changé ?

Nous cherchons des vins rouges plus légers, faciles à boire, moins alcooleux et moins lourds. Le blanc continue son ascension et le rosé se révèle de moins en moins saisonnier. Les tendances couleurs sont finalement les mêmes que le marché global du vin. Il est donc essentiel de faire toujours évoluer nos gammes en fonction de la demande, sur des vins très accessibles, des rouges à boire frais l’été, des blancs sur la fraîcheur...

Votre cœur de cible est toujours languedocien ?

Nous sommes depuis le départ spécialistes du pays d’Oc avec des clients historiques comme la cave gardoise Heraclès, celle d’Abeilhan dans l'Hérault, la famille Ortola dans l'Aude. Mais les opportunités se multiplient. De plus en plus de producteurs viennent nous faire des offres, ce qui n’était pas le cas les années précédentes, car ils n’arrivent pas à écouler leurs vins eux-mêmes. Notre cœur de gamme n’a pas changé mais nous rentrons de plus en plus de vins de France car nos consommateurs ne cherchent pas forcément des appellations. Ils sont plutôt fidèles aux cépages méridionaux classiques. On constate aussi un retour en force du sauvignon pour la fraîcheur et la vivacité, du pinot noir de terroirs d'altitude pour des vins très fruités, mais merlot, cabernets, syrah, viognier se maintiennent bien. Nous n’avons qu’une seule bulle, un prosecco qui profite du succès du spritz, en forte hausse, mais nous n’arrivons pas à vendre d’autres effervescents. On a même retiré de la gamme il y a 5 ou 6 ans un crémant de Bordeaux et une clairette. Quant aux BIB, qui avaient explosé pendant le Covid, ils ont marqué ensuite un coup d’arrêt car un format 3 litres au moment de l’achat, ça fait trois fois plus cher et ça fait réfléchir. On dispose d'une centaine de références dont 60 en marques propres, une quarantaine dédiées. On est distribué dans tous les magasins bio du territoire via les enseignes en direct ou par les grossistes, notamment par les marques Herisson, la Marouette ou Soleillé.

Qu’avez-vous changé quand vous êtes arrivée à la direction de l’entreprise par rapport à ce que faisait votre père ?

J’ai changé surtout l’équipe pour qu’elle soit plus à mon image, plus jeune et plus impliquée dans la communication et le marketing que mon père qui externalisait beaucoup. J'ai embauché quelqu’un à la créa qui gère les étiquettes, communique sur les réseaux sociaux. Nous avons renouvelé les gammes avec d’autres couleurs sur les packagings. On travaille beaucoup le marketing de nos vins car il est important de proposer des étiquettes qui attirent l’œil. Nous commercialisons actuellement 2,7 millions de bouteilles pour un chiffre d’affaires de 5,5 millions d'euros. On avait grimpé à plus de 3 millions avant le Covid.

Vous vous êtes impliqués davantage dans le réemploi des bouteilles ?

Nous avons relancé ce gros projet depuis trois ans. Un tiers de nos bouteilles lancées sur le marché est désormais réemployable mais tout n’est pas rapporté car les laveurs dans les régions revendent au plus près de leur implantation, pas forcément à nous directement. Le retour dépend beaucoup des magasins. Certains en récupèrent jusqu’à 70 %, en particulier quand ils sont situés dans l’ultra-centre des villes car leurs clients vont régulièrement y faire leurs courses. Ils achètent une bouteille, ils la consomment et ils la rapportent automatiquement. Pour la majorité, on est plutôt à 5-10 % de retour, peut-être encore par manque d’information auprès du consommateurs et parce que le système est encore méconnu. En Île-de-France, le plus gros bassin de consommation, il y a encore un trou dans la raquette par manque de laveur. Mais ça devrait changer prochainement. On communique sur le sujet par des formations auprès des équipes de vente, on les encourage à expliquer aux consommateurs, à mettre des stops-rayons (signalétique directement en linéaire, ndlr). Certains mettent en place des consignes monétaires en rajoutant 20 centimes remboursés au retour de la bouteille. Ceux qui choisissent cette formule ont en effet des taux de récupération en hausse mais, au départ, ce n’est pas la philosophie. Il faudrait que les grandes surfaces soient obligées d’utiliser un certain pourcentage de bouteilles réemployables, car on ne peut pas y arriver sans massifier.

Vous participez depuis trois ans à l’association 20 000 pieds sur terre. En quoi cela consiste-t-il ?

Depuis trois ans, nous soutenons des projets d’agroforesterie dans des domaines viticoles en versant 1 000 € par an. On participe à la plantation dans les vignes de haies et d’arbres, les moins gourmands en eau possible, en collaboration avec le producteur qui a présenté un projet et avec l’aide de jardineries de la région. Il est très intéressant de suivre l'évolution des plantations que nous parrainons. Mais l’association travaille aussi avec des exploitations agricoles hors vignes.

Comment percevez-vous l’évolution du salon Millésime Bio ?

Le salon est toujours très attendu par la profession, avec une grande liste d’attente côté exposants. C'est un salon avec une évolution maîtrisée pour rester à taille humaine, avec un stand identique pour tous, même s'il a été ouvert aux bières et aux spiritueux. Pour nous, le salon est l'occasion de lancer le nouveau millésime, de le faire goûter à nos clients en prenant des rendez-vous sur la plateforme en amont du salon, d'entretenir notre réseau.