Mercredi 25 Décembre 2024
Vincent Priou, directeur général du château Beauregard. ©Y. Tesson
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24.12.2024
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Sur la bordure Sud-Est du plateau de Pomerol, le château Beauregard, une splendide chartreuse girondine de l’époque napoléonienne, est l’un des plus anciens domaines viticoles de l’appellation. Pour autant, on doit aux familles Cathiard et Moulin-Houzé de lui avoir donné depuis dix ans un nouveau souffle. Pour célébrer cet anniversaire, elles nous ont proposé une verticale magistrale.
La reprise du Château Beauregard, c’est l’aboutissement d’une amitié de trente ans entre deux familles, les Cathiard (Smith Haut Lafitte) et les Moulin-Houzé (propriétaires des Galeries Lafayette) qui se prolonge aujourd’hui entre leurs enfants. Florence Cathiard explique : « Lorsque l’opportunité de racheter le château Beauregard s’est présentée, nous n’avions pas les moyens pour une telle opération, mais nous savions qu’ils avaient un gendre (Augustin Belloy) qui était un peu tombé dans les grands crus. » Philippe Houzé de son côté se souvient : « Nous étions déjà présents le soir du 1ᵉʳ janvier 1990, lorsqu’ils ont signé l’acquisition de Smith Haut Laffite. Nous avons vu le travail qu’ils ont réalisé. Nous avions donc entièrement confiance. »
La différence toutefois, c’est que ce projet sera réalisé au pas de course. Ce qui aura pris 34 ans au Château Smith Haut Lafitte, les deux familles réunies ont réussi à le mettre en œuvre en seulement dix ans. Vincent Priou, le directeur général, raconte : « Alors que l’acquisition s’est faite en juillet 2014, en neuf mois à peine, nous avons réussi à refaire la cuverie pour accueillir la vendange 2015, avec des cuves plus petites pour être plus précis au niveau des terroirs, et accompagner jusqu’au bout la sélection intra-parcellaire de la récolte. Nous avons aussi restructuré 7 hectares sur les 17,5 et nous nous sommes davantage équipés en matériel viticole pour avoir la réactivité nécessaire à la conversion bio débutée en 2009 qui avait déjà abouti à la certification du premier millésime en 2014. »
Pour célébrer cet anniversaire et dresser le bilan de cette première décade, Château Beauregard nous a proposé une verticale (en magnum et double magnum), en regroupant les millésimes par style.
On commence ainsi la dégustation par le 2017, une année un peu atypique, où le gel a touché les merlots, plus précoces que les cabernets francs, ce qui fait que la proportion de ces derniers est particulièrement élevée, 45 %, du jamais vu ! Le nez équilibre les notes fruitées et minérales, avec d’un côté le cassis et de l’autre la pierre à fusil. On les retrouve en bouche, appuyées sur des tanins un peu fermes, enrichis d’arômes poivrés et d’un soupçon de poivron typique du cabernet franc. Le vin a sans doute moins de rondeur que les autres opus, mais peut-être davantage de finesse. (91/100)
2021 est un peu dans la même veine. C’est presque un jumeau, même s’il est peut-être moins fruité. Sur ce millésime, les températures estivales n’ont pas beaucoup grimpé et la pluie a été très présente, entraînant une maturation lente. On retrouve de ce fait la même élégance qu’en 2017, avec beaucoup de fraîcheur et de droiture, ce qui se traduit par un vin très digeste. (92/100)
Avec 2015, on passe dans un tout autre registre. Ce millésime très solaire et sec est marqué par une rondeur séduisante. La bouche est chaleureuse, avec des arômes de myrtille, de mûre, de cannelle, de cerise noire cuite, de café torréfié, adoucis par un soupçon de vanille. C’est un vin puissant, entêtant, avec beaucoup de longueur, et en même temps sans couture, très harmonieux. (93/100)
2018 dans son profil se situe quelque part entre 2017 et 2015. Comme 2015, c’est un millésime solaire, ce qui lui donne beaucoup d’intensité, des tanins mûrs, mais il garde un peu plus d’élégance que le 2015 et moins de concentration, et d’ampleur. On a cette minéralité calcaire qui ressort à nouveau, cette même finesse, ces mêmes petites touches de poivre que l’on avait en 2017, avec en prime des notes florales de violette. On est vraiment dans l’équilibre parfait entre le fruit et la fraîcheur ce qui donne l’effet d’un costume parfaitement taillé. (94/100)
2020 a quelque chose d’exubérant avec, au nez, des notes de pivoine surprenantes, c’est aussi un vin encore jeune dont le boisé en bouche n’est pas encore totalement fondu. On a l’impression de croquer un grain de cassis avec à la fois l’amertume de la peau, le côté un peu collant et l’aromatique fruitée, acidulée et puissante qui se révèle ensuite. (94/100)
2022 a un profil très proche de 2020. La robe est encore très dense, en bouche on est vraiment sur le coulis de fruits rouges, plein de fraîcheur, avec de jolies notes de groseille. (95/100)
2016 nous rappelle les Bordeaux d’antan, avec un style un peu plus serré, très british, une texture soyeuse, et des notes épicées de clou de girofle très intéressantes. (95/100)
2019, avec un peu plus de puissance, ressemble beaucoup à 2016, mais sans que la patine du vieillissement ne lui ait encore conféré cette petite ambiance de sous-bois automnal qui commençait à poindre sur celui-ci. (94/100)
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