Mercredi 8 Janvier 2025
L'équipe du château de Sannes autour de Pierre Gattaz. ©LuberonSudTourisme Stéphane Kocyla
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05.12.2024
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En 2017, Pierre Gattaz achetait le château de Sannes, dans le Luberon. Sans abandonner Radiall, il se lance en parallèle dans l’aventure vigneronne avec sa famille, son épouse et ses enfants, afin de se donner une perspective entrepreneuriale sur le temps long et de partager le goût de l’excellence française. En 2024, la greffe a pris, les vins du château de Sannes rivalisent avec les plus grands sur les tables des restaurants étoilés, comme chez Guy Savoy, et deux de ses enfants participent à ce succès.
De sa formation d’ingénieur, Pierre Gattaz conserve l’esprit de méthode et ne s’improvise donc pas vigneron. Des cours d’œnologie et une lecture passionnée du géographe Jean-Robert Pitte, intarissable sur le vignoble français, inspirent l’ancien président du Medef : « Contrairement à l’industrie, pour faire du bon vin, le process ne suffit pas. L’alchimie opère sur le temps long avec la prise en compte d’une infinité de paramètres. » À défaut de percer tous les mystères du vin, Pierre Gattaz choisit d’en faire au château de Sannes.
S’enraciner dans un vignoble, mais où ? Avant d’opter pour le Luberon, Pierre Gattaz a étudié les différentes options, notamment bordelaise et bourguignonne. Le Luberon l’emporte par le cœur et la raison : la Provence, son empreinte olfactive et ses saveurs, rappelle les vacances, magnifie l’art de vivre méditerranéen, tout en étant accessible par le train.
Quant au château de Sannes, la propriété a des arguments à faire valoir : « Éloignés des influences maritimes, les 70 hectares du château de Sannes, dont 35 plantés en vignes, bénéficient d’un climat idéal avec une altitude modérée de 350 mètres en moyenne, qui favorise les variations de température. Par ailleurs, nous sommes en Pays d’Aigues donc nous ne manquons pas d’eau. » Tous ces avantages, nous assure son nouveau propriétaire, permettent de parer aux problèmes d’échaudages et plus largement au manque d’eau qu’entraîne le réchauffement climatique.
Depuis l’achat de la propriété, les membres de la famille Gattaz s’y rendent régulièrement pour surveiller l’évolution des vins, piloter les investissements et prendre part au quotidien de l’exploitation. « C’est un projet familial avant tout. Certes, nous nous sommes entourés d’œnologues, mais nous goûtons et nous faisons ensemble les vins que nous aimons » insiste Pierre Gattaz. Si s’approprier l’aventure du père a pu paraître intimidante pour la jeune génération, les circonstances en ont précipité l’adoption. Pendant le confinement, le château de Sannes a représenté une base arrière salutaire pour les citadins. Il n’en fallait pas plus pour s’accoutumer au pays et adhérer au projet. Désormais, Manon, pour la partie promotion et événementiel, et Thibault, pour le commerce, ont pris une part active dans l’entreprise.
Au moment de son acquisition, le château de Sannes ne produit plus de vin en son nom propre. Le vignoble est ancien, les plus vieilles parcelles ont été plantées en 1927, mais le vin n’est plus vinifié au château. L’ancien chai a même été détruit. Alors pour redorer le blason, un nouveau chai est érigé et une nouvelle gamme voit le jour, sans trahir le passé. Au contraire, elle s’y réfère. « 1603 » pour l’entrée de gamme rappelle la fondation de la propriété, « Castini » et « Aciana », par leur étymologie, que les Celtes ont sans doute foulé ces terres il y a plus de 4 000 ans, comme en témoigne un tumulus situé au nord du domaine.
C’est Thierry Rimbaud, que tout le monde appelle Arthur, chef de culture de la propriété depuis 36 ans qui évoque le mieux cette métamorphose : « Je partirai à la retraite avec le sentiment du devoir accompli. Alors que nous avions arrêté, nous faisons de nouveau du vin au château de Sannes, nous sommes passés en agriculture biologique et le vignoble va perdurer. »
Lorsqu’on lui demande si le château de Sannes a vocation à devenir un porte-drapeau pour l’AOC Luberon, Pierre Gattaz, rectifie avec humilité : « Avec les autres vignerons, nous partageons une identité collective que nous devons faire rayonner avec l’appellation. C’est dans cet esprit que je fais profiter de mon réseau. » Depuis 2023, au mois de juillet, le festival « Vins & Passions en Luberon » se tient au château de Sannes. L’événement réunit des vignerons de l’appellation, des producteurs gastronomiques du Luberon et des experts dans le parc du château autour de dégustations, d’animations et d’ateliers. Pour la troisième édition, rendez-vous le 27 juillet 2025 !
Avec constance, Jean-Robert Pitte l’a documenté : le vin est le produit d’une histoire et d’une géographie. En respectant ces deux dimensions, le défi de durer semble à la portée de la famille Gattaz.
Assemblage de rolle, ugni blanc et grenache blanc, ce vin atteste du travail effectué pour atteindre le juste équilibre. Entre attaque minérale et arômes d’agrumes, il conserve toute la fraîcheur nécessaire aux accords estivaux. Tonique, il réveillera donc les papilles à l’apéritif et sur les fruits de mer. 13,50 € TTC.
C’est le premier millésime de cette cuvée. Castini rouge, assemblage d’une majorité de syrah (80 %) et de grenache, est un vin gourmand. La rondeur des tanins s’obtient en l’élevant pour partie dans des jarres d’argile – dont la porosité favorise une légère oxydation –, pour l’autre en fûts de chênes. Au nez, le poivron grillé domine, avec une pointe de poivre. En bouche, les tanins veloutés accompagnent une sensation suave de cerise noire relevée par une finale mentholée. À réserver pour un beau carré d’agneau… aux herbes de Provence, bien sûr ! 38 € TTC.
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