Dimanche 22 Décembre 2024
Amandine Duthilleul, directrice du service “Protection de l’appellation” au Bureau national interprofessionnel du cognac (BNIC). ©Olivier Sarazin
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10.02.2023
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Au Bureau national interprofessionnel du cognac (BNIC) une équipe lutte contre les contrefaçons, les détournements de notoriété et le dépôt de marques trop évocatrices.
L’affaire est entendue : il n’y a de cognac qu’à Cognac et dans sa région. Victime de son succès, l’or ambré des Charentes a toujours été copié, imité, usurpé. Très tôt, négociants et viticulteurs comprirent qu’il fallait protéger leur trésor. Cela fut fait dès 1909, avec le décret dit Fallières, qui fixait les limites géographiques de l’aire de production et ouvrait la voie à la reconnaissance de l’appellation d’origine contrôlée (AOC) en 1936.
Aujourd’hui, la contrefaçon n’a pas disparu. Dernier exemple en date : au printemps 2022, pas moins de 2 000 bouteilles de faux cognac ont été saisies et détruites près de l’aéroport de Copenhague (Danemark). Les flacons avaient été embouteillés dans les Balkans, étiquetés au Danemark et devaient être écoulés en Suède. « Ce succès doit beaucoup à la collaboration active avec les autorités danoises et l’agence européenne de police criminelle Europol », souligne Amandine Duthilleul, chargée de la protection de l’appellation cognac au Bureau national interprofessionnel du cognac (BNIC).
Une bière “flavour cognac” en Israël
« Plus que jamais, l’AOC est un patrimoine à chérir et à défendre. Nous devons redoubler de vigilance », insiste la juriste, dont le service qu’elle dirige traite environ 200 dossiers par an. La contrefaçon n’est pas le seul fléau. Le détournement de notoriété inquiète aussi. Cet été, le BNIC a obtenu l’arrêt de la fabrication, de la commercialisation et de la promotion d’une bière vendue en Israël. La boisson promettait un « goût cognac » (“flavour cognac”) sur l’étiquette. Elle n’en contenait pas une goutte ! Neuf palettes ont été jetées. « L’affaire s’est réglée à l’amiable et la partie adverse s’est engagée à ne plus utiliser le mot cognac », indique Amandine Duthilleul.
Expliquons-nous : les actions du BNIC ne visent pas à interdire l’usage du terme cognac, « mais les modalités relatives à la présentation et promotion des produits doivent faire l’objet d’une attention particulière. L’AOC, c’est notre patrimoine commun. C’est la garantie qu’une bonne partie de la valeur ajoutée générée sur les marchés soit partagée en France et dans notre région », poursuit la juriste.
Un produit de beauté “Cognac Diamond” à Taïwan
L’équipe d’Amandine Duthilleul, de taille modeste mais efficace, avec un troisième expert recruté en 2022, s’appuie sur tout un réseau en France et à l’étranger : ressortissants, ambassades, autorités de contrôle et une cinquantaine de cabinets d’avocats. Récemment, l’office local de la propriété intellectuelle de Taïwan a refusé l’enregistrement de la marque « Cognac Diamond », déposée pour une marque de cosmétique.
Dernier exemple en France : en septembre, l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) a rendu une décision favorable à une demande conjointe du BNIC et de l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO), en refusant l’enregistrement d’une marque française « Cognapea ». Les ressemblances phonétiques avec le nom cognac constituaient une « évocation, au sens juridique du terme ».
Il a été rappelé à cette occasion que « l’évocation d’une appellation protégée est interdite non seulement pour les produits qui ne répondent pas au cahier des charges de l’appellation mais aussi pour ceux bénéficiant de l’appellation cognac. La multiplication de ces usages qui consisterait à dénaturer l’appellation risquerait d’affaiblir sa notoriété », prévient le BNIC.
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