Samedi 21 Décembre 2024
Marcello, Matteo, Camilla et Allessandro Lunelli avec Cyril Brun
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15.06.2023
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Cyril Brun qui a cédé sa place de chef de caves de la Maison Charles Heidsieck il y a deux mois à peine à Elise Losfelt devient chef de caves de Ferrari Trento, une maison qui élabore des sparklings au pied des Alpes en Italie. Un événement historique puisqu’il est le premier chef de caves champenois à quitter l’appellation pour rejoindre de manière permanente un domaine italien. Matteo Lunelli, président de cette très belle marque créée en 1902, a accepté de commenter cette nouvelle collaboration prometteuse.
Votre maison entretient une relation ancienne avec la Champagne ?
En effet, elle a été fondée en 1902 par Giulio Ferrari qui est venu se former à l'élaboration des vins effervescents en Champagne à la fin du XIXe siècle. Il a aussi été le premier à ramener en Italie le chardonnay, un cépage qui s’est ensuite diffusé dans tout le pays et ce jusqu’en Sicile. Dans notre appellation (Trento Doc), nous utilisons aussi du pinot noir, du meunier et du pinot blanc. Mais chez Ferrari, c’est le chardonnay qui est au cœur de notre marque. Nous avons recours à des clones spécifiques, plus adaptés à la montagne. Avec le réchauffement climatique, cette localisation constitue un formidable atout. Nous plantons de plus en plus haut, à des altitudes où autrefois la culture de la vigne était impossible. L’ensemble de notre vignoble est certifié bio et les vignerons livreurs qui travaillent avec nous, souvent de longue date, suivent tous un protocole de viticulture durable.
D’un point de vue gustatif, qu’est-ce qui distingue les sparklings de Trento Doc du champagne ?
Le style est proche, il s’agit aussi de secondes fermentations en bouteille. Quelqu’un qui aime le champagne, appréciera le Trento. La différence, c’est cette montagne, qui fait que l’on bénéficie à la fois du soleil de l’Italie dont la chaleur est plus intense qu’en Champagne, mais en même temps de l’air froid qui descend des sommets la nuit. On obtient ainsi des raisins bien mûrs tout en conservant une belle acidité. D’où le côté éclatant du fruit de notre chardonnay. En Champagne, l’expression sera plus minérale, grâce à ce sol assez unique, la craie, qui donne une salinité extraordinaire. Clairement, l’objectif de Cyril n’est pas de chercher à reproduire le goût du champagne, mais au contraire de renforcer l’expression du terroir de Trento. Le choix de Cyril Brun de nous rejoindre démontre que le monde des sparkling wines devient de plus en plus international. La Champagne demeure une référence, l’endroit où tout a commencé, mais l’excellence n’est plus son monopole. D’autres étoiles brillent désormais dans la galaxie. Nous avons été nommés cinq fois « sparkling wine producer of the year », c’est le signe que non seulement le public, mais aussi les leaders d’opinion, commencent à placer le Trento et Ferrari au pinacle des grands vins effervescents.
Justement, qu’est-ce qui vous amené à recruter Cyril Brun ?
La recherche d’un nouveau chef de cave nous a pris beaucoup de temps parce que c’est un poste clef pour l’avenir de la Maison. Nous avions rencontré Cyril au Championnat mondial des sparklings wines voici plusieurs années. Récemment, alors que je discutais avec Alberto Lupetti, un ami journaliste spécialiste du champagne, je lui ai demandé s’il connaissait un œnologue dont le profil pourrait correspondre à nos attentes. La rumeur du départ de Cyril Brun de Charles Heidsieck circulait et il nous a mis en relation. Cyril appréciait déjà nos vins, mais avant d’aller plus loin, il est venu visiter notre vignoble. Le fait qu’il soit issu d’une maison où le chardonnay est le cépage iconique constituait un argument de poids pour nous. J’aime beaucoup les vins de Charles Heidsieck, que ce soit le Blanc des millénaires ou les non vintages. Son expérience de 15 ans chez Veuve Clicquot nous intéressait aussi. D’abord parce que c’est une maison qui place le pinot noir au cœur de son identité, et même si ce cépage est moins important chez nous, nous en plantons de plus en plus et nous l’utilisons notamment pour nos rosés. Or, chez Veuve Clicquot, Cyril Brun a justement beaucoup travaillé sur ce type de cuvées. Deuxième point, Veuve Clicquot est une marque dont la production est très importante et qui, malgré cela, parvient à maintenir un niveau très élevé de qualité. Nos volumes, avec 7 millions de bouteilles vendues chaque année, sont également conséquents ce qui ne nous empêche pas en Italie de nous positionner en termes de réputation dans le peloton de tête parmi les plus grands vins effervescents de luxe. Aux Etats-Unis, notre non vintage est commercialisé à 27 dollars et nos cuvées spéciales atteignent 100 dollars. On a donc besoin non seulement d’un chef de caves de talent, mais aussi d’une personne capable de manager le process et tous ces petits détails où se joue l’excellence. Enfin, elle devait savoir diriger et amener à travailler ensemble une équipe nombreuse.
Quelles seront les priorités de Cyril Brun ?
Notre premier objectif sera de continuer à perfectionner notre non vintage. Chez Ferrari, nous avons la même philosophie qu’en Champagne, on juge d’abord une grande maison à la qualité de son Brut sans année. C’est sur ce critère que notre équipe et Cyril évalueront d’abord leur succès. Tout comme Cyril, j’ai d’abord foi dans les petits changements qui peuvent souvent avoir des impacts majeurs. Je pense qu’il pourra importer certains éléments champenois, mais pas d’autres. Alors que notre équipe de dix œnologues était jusqu’ici exclusivement composée d’Italiens formés dans nos écoles, cet apport extérieur va nous ouvrir et nous enrichir. On notera aussi que si en Italie des Wine Consultants Champenois sont actifs, comme Richard Geoffroy, le fait de recruter un chef de caves champenois de façon permanente est une première historique.
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