Jeudi 19 Décembre 2024
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07.02.2023
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À la tête de la « Team France » depuis plus de trois ans, David Biraud, qui a représenté la France à quatre reprises au concours de Meilleur Sommelier du Monde, met son expérience au service du collectif et de la préparation des candidats tricolores aux grandes épreuves internationales. Entretien.
David, comment s'est structurée la « Team France » autour des candidats français ces dernières années ?
Cette idée de « Team France » a été lancée il y a plusieurs années par Olivier Poussier (Meilleur Sommelier du Monde 2000, NDLR) pour donner un cadre, une organisation, aux candidats français dans la préparation des concours de Meilleur Sommelier d'Europe & Afrique et Meilleur Sommelier du Monde. Olivier ayant intégré la commission technique de l'Association de la Sommellerie Internationale, il m'a demandé, avec Philippe Faure-Brac, de reprendre les rênes de cette « Team » à partir de la fin 2019. Mais je ne suis pas seul : comme son nom l'indique, il s'agit d'une équipe, qui fédère différents talents, des expertises, au service d'une candidate ou d'un candidat. Le but est de leur donner un cadre, une organisation, pour rester sur les rails : se préparer à un grand concours international, c'est du sport de haut niveau, cela demande un entraînement constant, un suivi quotidien, ne pas remettre des choses au lendemain. Il faut avoir un programme et s'y tenir. C'est à cela que nous servons.
Comment se compose cette « Team France » ?
Elle se compose d'un noyau dur, d'anciens Meilleurs Sommeliers de France ou Meilleurs Ouvriers de France en sommellerie, mais aussi des Masters of Wine, des consultants, des experts en bière ou en spiritueux. La liste des intervenants est longue mais l'on peut citer Philippe Troussard, Gaëtan Bouvier, Denis Verneau, Franck Thomas, Manuel Peyrondet, Franck Ramage, Jérémy Cukierman, Alexandre Vingtier, Guirec Aubert. Autour de cette équipe qui va apporter ses connaissances théoriques et pratiques, on trouve des sophrologues, des professeurs de théâtre, tous les talents qui peuvent aider un sommelier à préparer un concours de très haut niveau dans un environnement semi-professionnel.
En quoi la création de cette équipe était importante ?
Le niveau mondial de la sommellerie ne cesse de progresser. On ne pouvait plus se contenter d'arriver sur les concours en se disant « nous sommes Français, nous avons un avantage naturel et tout va bien se passer ». Les autres pays ont pris le pli de très bien se préparer, ils étaient souvent mieux structurés que nous. Je crois que nous avons rattrapé notre retard et sommes désormais au niveau d'excellence internationale. De mon côté, j'essaie de faire valoir mon expérience*. Quand j'ai commencé à représenter la France en 2010, je me suis fait un cadre de préparation, j'ai regardé comment fonctionnaient certains candidats très bien organisés, notamment des Scandinaves ou venus des pays baltes. C'est ce que j'essaie d'apporter à la « Team France », avec tous mes camarades qui donnent aussi beaucoup de leur temps bénévolement.
En quoi la préparation de la candidate française Pascaline Lepeltier au concours de Meilleur Sommelier du Monde est-elle spécifique ?
Pascaline a été désignée en mars 2022. Cela fait près d'un an que nous la suivons. J'ai un échange téléphonique hebdomadaire avec elle, on lui apporte de l'aide et de l'assistance pour lui fournir de la matière théorique, pour l'abreuver en informations. Dès qu'elle venait en France on l'accueillait dans une « training room » dédiée à la dégustation, où nous réunissions des échantillons du monde entier, des spiritueux, des liqueurs etc. Nous avons aussi travaillé tous les aspects du service du vin, de l'aération, de la décantation. Pascaline a aussi travaillé toute la partie théâtralisation avec Franck Thomas et son épouse qui est actrice, à Antibes. Elle s'est aussi entourée de sa propre cellule à New York, là où elle vit et travaille, avec des professionnels de Broadway pour tout ce qui relève de la performance en public. Pascaline a beaucoup d'atouts. Au-delà de sa grande connaissance du vin, elle est parfaitement bilingue, elle écrit très bien, a une ouverture internationale très poussée sur tous les produits. Elle arrive très bien préparée, je pense qu'elle a tout donné pour ne pas avoir à se dire « j'aurais pu en faire plus ».
Sur quoi va se jouer l'issue de ce concours ?
Ce qui va être déterminant c'est la gestion du stress, la capacité à encaisser la pression de l'événement. Être à chaque instant capable de faire preuve de réactivité, d'intuition, de prise de décision. Le niveau n'a jamais été aussi élevé, sur 68 candidats il y a sans doute la moitié qui peut prétendre aller en demi-finale. Il ne faut donc pas croire que le quart de finale est une formalité. Encore une fois, c'est comme un sport de haut niveau : tous les candidats sont des compétiteurs et il va falloir être à la hauteur de l'enjeu dès le départ, rester concentré, savoir louvoyer entre les pièges. Il faut aussi arriver libéré, rester soi-même, et prendre du plaisir, une étape après l'autre.
*David Biraud a représenté la France à quatre reprises au concours de Meilleur Sommelier du Monde, en 2010, 2013, 2016 et 2019. Il a été classé troisième en 2010 et second en 2016. Il a également été candidat au concours de Meilleur Sommelier d'Europe & Afrique en 2010 (2ème), 2013 (2ème) et 2017 (3ème).
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