Dimanche 22 Décembre 2024
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13.04.2022
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La Maison de Venoge a commandé à l’artiste Juan Carlos Carrillo une statue de Louis XV en bronze qui ornera la cour de son hôtel Avenue de Champagne et rendra hommage au fameux arrêt de 1728 autorisant le transport en bouteilles des vins en Normandie, première intervention de l’Etat en faveur du champagne !
2022 célèbre les 300 ans du sacre de Louis XV. La Maison de Venoge qui possède dans sa gamme la fameuse cuvée « Louis XV » ne pouvait passer à côté de cet événement. D’autant que comme le souligne son président Gilles de La Bassetière, le personnage a joué un rôle sans doute encore plus important pour la Champagne que le moine Dom Pérignon et qu’il est souvent oublié. Une statue en bronze du souverain, à l’échelle humaine, devrait donc bientôt trôner devant l’hôtel de Venoge, lui-même de style néo-Louis XV ! Sa création a été confiée au sculpteur péruvien Juan Carlos Carrillo. Le monarque est mis en scène, une flûte de champagne à la main, confortablement installé dans un fauteuil, tenant encore la plume avec laquelle il vient de signer le fameux arrêt du 25 mai 1728. Un deuxième fauteuil placé à ses côtés permettra aux passants de trinquer avec lui.
Pourquoi cet arrêt est-il un moment clef dans l’épopée du champagne ? Parce qu’à la demande expresse des échevins de la ville de Reims, il autorise le commerce des vins en bouteilles en Normandie qui ne pouvait se faire jusque-là qu’en fût. Or, sans bouteille, il était évidemment impossible de transporter le champagne. L’affaire était d’importance car c’est par cette région que transitaient les vins exportés vers l’Angleterre, premier marché historique du champagne. Ce décret n’est pas le point de départ du commerce du champagne comme certains historiens l’ont parfois affirmé puisqu’en France, une ordonnance sur les aides qui ne concernait pas la Normandie, régulait déjà le commerce en bouteilles depuis 1680. En revanche, il montre qu’à partir de cette époque celui-ci connaît un véritable essor et que conscient des intérêts économiques de la France, pour la première fois, le gouvernement en la personne de Louis XV s’y intéresse et entend tout mettre en œuvre pour l’encourager. Les Britanniques d’ailleurs ne tardèrent pas à répondre à ce texte qui risquait de provoquer une marée de vins de Champagne sur leur marché. Il impliquait peut-être aussi la fin de la champagnisation, en Angleterre même, des vins de Champagne importés par les marchands londoniens, ce qui fut sans doute la première forme de champagne qu’on vit apparaître sur l’île. C’est pourquoi, comme l’indique l’historien Benoît Musset, dès le 28 mai 1728 « un Bill du Parlement anglais interdisait l’importation en Angleterre des vins de Champagne en bouteilles ».
Pour trouver un artiste avec une formation classique qui lui donne les capacités de réaliser une sculpture respectueuse du style du XVIIIe siècle, Gilles de la Bassetière a mis près de dix ans. Pourtant cette perle rare, passée par les Beaux-Arts de Venise, était presque sous ses yeux : son atelier est en Champagne même, à Châlons ! Le temps de cette réalisation, Juan Carlos Carrillo s’est installé dans un garage juste à côté de l’hôtel, les visiteurs peuvent ainsi venir assister à la création de cette œuvre. L’artiste a déjà produit une maquette plus petite en plâtre qui donne une idée du résultat final. Pour l’heure, il façonne la sculpture en terre, support du futur moule. « Je récupère toujours l’argile avec laquelle j’ai fait mes précédentes sculptures. Elle porte ainsi la mémoire de mes œuvres antérieures ». La sculpture en terre pèsera 700 kilos, d’où une armature en fer à l’intérieur qui la soutient. L’artiste en est encore au stade du corps dont il faut respecter scrupuleusement l’anatomie, puisque les habits qu’il sculptera ensuite, très fins, en feront ressortir les formes. Pour le visage, il s’est inspiré de portraits d’époque même si on n’en possède pas de cette période précise. Le geste par lequel Louis XV tend sa flûte est magnifique et rappelle celui de Dieu sur le plafond de la chapelle Sixtine tendant la main vers les hommes pour leur donner la vie, le monarque ne donne-t-il pas ici la vie au champagne ? Quant à la main qui tient la flûte, elle la tient non pas par la tige mais par le pied, à la manière des personnages du tableau de Jean-François de Troy. A noter qu’en jouant sur différents procédés d’oxydation la statue en bronze finale sera colorée.
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