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Delord joue le baco en monocépage

Jérôme Delord ©F.Hermine

Auteur

Frédérique
Hermine

Date

28.06.2024

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Longtemps mal aimé, le baco, 22A de son petit nom, a su se faire une place en Armagnac et même en monocépage comme pour la Maison Delord.

Dans les villages, sans prétention, le baco avait mauvaise réputation. Cet hydride, croisement de folle blanche et d’un cépage américain, le noah, a pourtant permis au début du XXe siècle de lutter contre le phylloxera. Mais il a été abandonné à partir des années 30, accusé de générer des arômes trop foxés et surtout de contenir du méthanol dangereux pour la santé. Il aurait fallu néanmoins en boire des tonneaux pour prendre de réels risques. Bref, le baco noir disparaît dans les années 50, condamné à monter dans la même charrette que tous les hybrides. Seul subsiste le baco blanc autorisé dans la production d’eau-de-vie en Armagnac. Ce baco 22A doit son nom à la rangée du vignoble expérimental de son inventeur, l’instituteur Maurice Baco. Lui aussi a failli être rayé de la carte du vignoble au début des années 2000, banni par l’Inao. Il n’a été sauvé de la guillotine administrative que par quelques passionnés armagnacais. Les temps changent et on redécouvre que le cépage accusé de tous les maux dispose de quelques atouts, notamment celui de résister à toutes les maladies sans traitement ou très peu. De surcroit, il est riche en resvératrol, polyphénol aux vertus antioxydantes. Le baco qui est le seul hybride autorisé en AOP contribue aujourd’hui à environ un tiers de la production d’armagnac, en particulier en Bas-Armagnac et en Ténarèze. 

En monocépages

Maison Delord gamme Baco ©F. Hermine

Dans cette région d’assemblage, Il commence à être travaillé en monocépage par Tariquet, Laballe, l’Espérance, et même en Blanche d’Armagnac chez Garreau, Darroze… Aujourd’hui la cinquième génération de maison Delord, a également entrepris de communiquer sur le cépage « même s’il ne représente que 10% de l’encépagement  [environ 5 hectares sur les 57 hectares de production], majoritaire en ugni blanc (les deux tiers), et en colombard (20%) avec également un peu de folle blanche et de plan de graisse, reconnait volontiers Jérôme Delord. C’est une façon d’intéresser les amateurs d’armagnacs à des produits différents et d’apporter de la nouveauté ». Il bénéficie d’un marqueur spécifique, l’eugénol présent dans la pellicule de la baie. Cette molécule de défense de la plante génère une aromatique spécifique. « Non seulement il est solide et résistant, antifongique et analgésique mais il a de bons rendements, repart facilement après le gel et c’est aussi un booster aromatique du fruité ». Il se développe sur des notes de banane cuite, d’épices, de clou de girofle… Les Delord, Sylvain, le nez de la famille en vignes et au chai, Jérôme au commerce et à la communication, font régulièrement vieillir du baco en monocépage depuis 2015, mais pas sur tous les millésimes « car nous sommes avant tout des assembleurs. Mais nous gardons toujours un ou deux fûts en monocépages pour comparer les distillations et les barriques ». Ils utilisent un alambic Sier et un alambic Orthez dans le chai de Galaubas, un domaine qui avait appartenu jadis à la famille et racheté il y a quatre ans.  Ils travaillent avec deux tonneliers, Bartholomo et Allary et mixent ensuite les couples pour faire émerger différents profils à un degré compris entre 55 et 57%..

Actuellement pour s’offrir une dégustation comparative, la maison Delord propose un trio de Bas-Armagnac de 25 cl Ugni blanc - Folle blanche - Baco distillés en alambic Sier, titrant entre 52 et 54% et vieillis 24 mois en fûts de Bartholemo. (60 € sur un support en bois).