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La Blockchain trace son sillon dans le monde du vin

Application Wine In Block ©DR

Auteur

Jean-Michel
Brouard

Date

17.02.2025

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Encore souvent très classique, le monde de la vente et de la distribution des grands vins connaît une révolution majeure depuis quelques années avec des acteurs utilisant la Blockchain et des tokens. Un outil puissant qui n’en est qu’à ses prémices. 

Aujourd’hui sur le marché français, plusieurs acteurs proposent aux propriétés viticoles d’utiliser la blockchain pour différents services, et notamment sécuriser leur distribution. Parmi eux, citons Winechain qui est soutenu par de grands noms du monde viticole (famille Rouzaud, propriétaire notamment des champagnes Roederer, la famille Perrin du château Beaucastel, la famille Moueix  (Petrus, Duclot) ou bien encore Michel Reybier du château Cos d’Estournel), Wine in Block, FideWine ou bien encore InterCellar qui compte de nombreux acteurs de la tech parmi ses actionnaires. Toutes ces entreprises ont d’ores et déjà levé des millions d’euros pour leur développement. Pourtant, évoquer la blockchain et les tokens, fongibles ou non-fongibles (NFT) qui peuvent être générés, contribue souvent à des réactions de défiance. Celles-ci sont compréhensibles mais souvent non-fondées car elles procèdent d’une méconnaissance du sujet, notamment lorsqu’il est appliqué au monde des grands vins et spiritueux. Au début des années 2020, la blockchain a en effet été utilisée pour créer et stocker de manière inviolable des actifs numériques. Dans le monde de l’art, des œuvres entièrement digitales ont ainsi été produites, leur prix étant fixé de manière opaque. Une spéculation massive s’en est suivie, certains rachetant les œuvres à des prix stratosphériques jusqu’à l’explosion d’une bulle qui ne reposait que sur la croyance, celle d’une hausse future permanente des cours. Mais la réalité a rattrapé les investisseurs qui se sont massivement désengagé de ce qui s’apparentait beaucoup à des coups de communication plutôt qu’à des révolutions artistiques majeures… Quelques années après seulement, on peut donc comprendre les craintes des professionnels et des consommateurs lorsqu’on leur parle d’une technologie similaire. Pourtant, les choses sont totalement différentes. La grande différence de ces NFT dans le monde viticole ou des spiritueux est qu’ils sont adossés à un actif physique, en l’occurrence la bouteille. Et cela change tout puisque le prix de l’actif financier représentatif du jumeau numérique de ladite bouteille dans la blockchain est celui de la bouteille physique. Mais alors, quel intérêt à utiliser une telle technologie ? 

bouteilles wine in block
©DR

La réponse à des problématiques centrales

Tout d’abord, si toutes les entreprises mentionnées utilisent la blockchain, toutes n’ont pas systématiquement recours aux NFT dans leur offre. Ainsi Wine in Block propose principalement d’associer un passeport digital inviolable à chaque bouteille physique d’une propriété. Ceci va permettre de suivre la bouteille tout au long de sa vie via une puce RFID associée qui va pouvoir être scannée, donnant par la même occasion des informations sur la bouteille en question. « Cette technologie ultra sécurisée permet de répondre à différentes problématiques, l’authenticité des bouteilles ainsi que la traçabilité », rappelle Sylvie Busca, co-fondatrice et PDG de Wine in Block. La garantie sur l’origine de la bouteille répond à une demande forte de marchés très exposés à la contrefaçon comme les pays asiatiques. Le suivi des bouteilles permet quant à lui de s’assurer de la correcte distribution des vins au niveau international (en vérifiant que les vins ne se trouvent pas dans des pays ou lieux où ils ne devraient pas être). Ces passeports digitaux peuvent aussi être revendus, assurant à chaque revente de la bouteille physique, les mêmes garanties d’origine, c’est ce que propose Fide Wine. On reste ici dans un système de distribution classique où l’on ajoute simplement une sécurisation supplémentaire à l’ensemble. La rupture est plus importante du côté d’acteurs comme Intercellar et Winechain. Là, les vins qui quittent les propriétés sont stockés dans des hangars spécialisés. Les bouteilles sont dématerialisées via des NFT qui sont achetés par les consommateurs. Ceci leur garantit le même niveau de sécurité en matière d’authenticité et permet également de répondre aux problématiques croissantes de stockage des vins dans de bonnes conditions, notamment pour des acheteurs urbains. Ceux-ci peuvent décider in fine de se faire livrer les vins ou de les revendre directement sur une market place accessible à la communauté d’acheteurs. Si la traçabilité des échanges sur ce marché secondaire est également assurée, il est possible d’appliquer des royalties à chaque changement de main pour que les propriétés puissent aussi capter une partie de la valeur générée. Chaque site propose évidemment une expérience utilisateur différente.

main ordi, avec verre de vin
©DR

Winechain met en avant une offre large (plus de 1500 références) ainsi qu’un service de conseils pour constituer sa cave via un service de conciergerie piloté, tout comme le choix des vins proposés, par Antoine Petrus, double MOF Sommellerie et Maître d’hôtel. Coté Intercellar, la présentation ludique des bouteilles en 3D s’accompagnera dès 2026 de la possibilité de présenter sa cave digitalement de manière totalement personnalisée. Cette fonction, tout comme l’accès à de nombreux avantages (accès à des allocations rares, coûts de stockage réduits…) sera en outre permis par un paiement en tokens. Ces jetons de fidélité (qui seront lancés à la mi-mars) constituent une cryptomonnaie à part entière. Ils seront aussi acquis par les propriétés à chaque vente de bouteille sur la plateforme. Elles pourront ensuite les convertir en opérations de communication sur le site ou les réseaux sociaux associés ou bien pour accéder à des données marketing sur les clients (profil, localisation, typologies d’achats…). « Une manière de « gamifier » l’achat de vin qui pourrait plaire à des consommateurs plus jeunes » explique Louis de Bonnecaze, le fondateur d’InterCellar. Ces tokens seront par ailleurs cotés et leur cours évoluera. Des investisseurs se sont ainsi positionnés aux côtés de classiques consommateurs lors de l’émission d’un premier bloc de tokens en prévente.