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L’appellation Médoc Blanc dans les starting blocks !

Grappe de sauvignon récolte

Photo archive ©DR

Auteur

Michel
Sarrazin

Date

12.02.2025

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Présenté en 2023, le cahier des charges initié en 2018 pour la création de l’appellation « Médoc » blanc vient d’être validé par l’INAO ce 6 février 2025. C’est le résultat de la volonté de quelques propriétés, dont certains crus classés en 1855 pour le rouge, et d’un syndicat opiniâtre qui croit depuis longtemps à la légitimité de cette nouvelle appellation.

Hélène Larrieu, directrice de l’ODG Médoc, Haut-Médoc et Listrac, tient néanmoins à préciser que « si l’INAO a validé le cahier des charges, celui-ci est en phase de procédure nationale d’opposition. Il faut donc attendre une signature définitive par le ministère de l’Agriculture ». En 1936, la création des AOC Médoc et Haut-Médoc avait oublié qu’un blanc réputé était produit sur la presqu’île du Médoc. Les viticulteurs usaient malgré tout de l’appellation communale (Listrac, par exemple, qui s’en était fait une spécialité) pour mettre sur le marché des blancs reconnus pour leur qualité, jusqu’à ce que l’INAO, dans les années 1960, mette un terme à cette tolérance, obligeant les viticulteurs, de moins en moins nombreux, à se replier sur l’appellation Bordeaux Blanc.

Une appellation légitime

La production de blanc en Médoc remonte au XVIIIᵉ siècle, notamment grâce aux vignerons de Blanquefort. Presque aussi ancienne que celle des vins rouges, elle connaît des fluctuations. Yves Raymond, propriétaire du château Saransot Dupré, à Listrac, et historien des blancs du Médoc, fait remarquer « qu’en 1750, Joseph de Navarre note déjà un désintérêt pour les blancs au profit des rouges. On arrache et on surgreffe ». Ainsi, la production passe de 17 000 hl en 1930 à seulement 1 800 hl en 1969, avant de remonter à 9 500 hl aujourd’hui sur 208 ha pour 89 producteurs.

Malgré une production limitée, la demande progresse depuis 15 ans. Le Médoc blanc est une perle rare et mise sur la qualité pour gagner en notoriété. Yves Raymond souligne que « ces vins se vendent parfois aussi cher, voire plus, que les rouges, bien que leur positionnement tarifaire interroge certains consommateurs, car ils sont plus chers qu’un Bordeaux blanc conventionnel ». Pour asseoir leur identité et justifier leurs prix (12 € à plus de 100 € pour les crus classés), des règles strictes ont été établies dans un nouveau cahier des charges. Mais qu’est-ce qui distingue le Médoc blanc du Bordeaux blanc ?

Se démarquer

L’encépagement reste centré sur le noyau dur des Bordeaux blancs traditionnels : sauvignon blanc (majoritaire), sauvignon gris, sémillon et muscadelle. Mais quelques nouveaux cépages s’invitent : six VIFA (Variétés d’Intérêt à Fin d’Adaptation) peuvent intervenir (alvarinho, liliorila, viognier, sauvignac et des cépages résistants aux maladies comme le floréal et le souvignier gris). Le chardonnay, le chenin et le manseng, initialement envisagés, ne sont pas autorisés.

L’aire de délimitation de l’AOC Médoc blanc est la même que celle du rouge, c’est-à-dire sur les huit appellations médocaines (six communales, Médoc et Haut-Médoc). « C’est ce qui a permis d’aller vite dans la validation du cahier des charges », nous dit Yves Raymond, « car s’il avait fallu dessiner un nouveau territoire, cela aurait pris plus de temps ». Une aire qualitative, puisque calquée sur celle du rouge.

L’élevage en barrique est également un critère de différenciation. Au moins 30 % du volume devra être passé sous bois. « C'est un minimum que les producteurs de blancs actuels ont convenu et qui était nécessaire pour porter l'aromatique de salinité et d'agrume. Ce boisé n’est surtout pas là pour donner un goût de bois », précise Hélène Larrieu. Un élevage essentiel à la construction du profil organoleptique.

Quel profil ?

Une commission d'enquête a identifié les caractéristiques particulières des vins blancs produits en Médoc. « Les vins blancs du Médoc offrent un nez aromatique marqué par des notes d’agrumes, de fruits blancs (pêche, abricot), d’exotisme et de litchi, ainsi que des touches florales apportant élégance et complexité. En bouche, ces arômes se confirment avec des vins structurés, équilibrés et gras grâce à la vinification sur lies en barrique. Certains révèlent aussi une minéralité ou une salinité selon leur terroir. »

Parmi les perspectives qui s’ouvrent, on note une orientation probable. Loïc Le Bozec, directeur technique du château d’Arsac (cru bourgeois exceptionnel en 2020 et 2025), envisage désormais deux cuvées : « une premium, plus travaillée, finement boisée, en appellation Médoc blanc et une autre en Bordeaux blanc ».

Une diversification ainsi qu’un positionnement plus haut de gamme en qualité et en prix se dessinent.