Dimanche 24 Novembre 2024
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03.03.2022
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Chez Laurent-Perrier, on parle rarement pour ne rien dire, alors quand le chef de caves Michel Fauconnet accepte de quitter sa tanière de Tours-sur-Marne pour rencontrer les journalistes, on ne se fait pas prier pour venir l’écouter. La présentation du Brut millésimé 2012 le justifiait pleinement : un vin ample, riche et en même temps vif et entraînant.
La sortie du Brut millésimé 2012 de Laurent-Perrier est un événement pour la maison : depuis la reprise par la famille Nonancourt en 1938, il représente le 30ème opus de cette cuvée, sur un millésime qui plus est symbolique puisqu’il célèbre le bicentenaire de la marque. L’occasion était si exceptionnelle que Michel Fauconnet, dont le faible attrait pour les mondanités n’a d’égale que la passion pour l’art de la vinification, a accepté de mettre le nez hors de sa cuverie pour venir le présenter en personne aux caves Legrand.
Au passage, on dira deux mots de ce chef de caves atypique. Fils d’un paysan de l’Aube, et amoureux de la terre, il se destinait à reprendre la ferme de ses parents, participant dès l’âge de 14 ans au championnat de labour. A la suite de son BTS agricole, en 1974, il effectue par curiosité un stage chez Laurent-Perrier, mais sans la moindre intention de se lancer dans le métier. C’est là que bien malgré lui, il attrape le virus du champagne. Celui qui se définit comme un autodidacte de Laurent-Perrier y fera toute sa carrière, formé aux côtés d’Alain Terrier dont il prendra la succession en 2004. A son arrivée en pleine crise pétrolière, la maison construisait sa première cuverie en inox, à peine 10.000 hectos à l’époque, elle en fait aujourd’hui 300.000. Le jeune homme a ainsi grandi avec la maison et eu la chance de participer à la création du style de la marque qui se cherchait encore, notamment à travers tout un travail de sélection des levures. L’un des secrets de l’homogénéité qualitative de la maison ? La règle d’or définie par Bernard de Nonancourt : seuls le chef de caves et le patron ont voix au chapitre lorsqu’il s’agit de prendre des décisions ayant trait au vin. Les commerciaux ne s’occupent que de commerce ! Un principe qui permet de garder en cave des millésimes à haut potentiel comme 2012 tout le temps nécessaire à leur maturation.
L’enjeu de la cuvée millésimée chez Laurent-Perrier consiste à trouver le juste équilibre entre l’empreinte du style de la maison et celle propre au millésime. Avec des gelées de printemps qui avaient réduit la charge des vignes et un été sec et ensoleillé, la caractéristique générale de 2012 était une belle concentration et une belle maturité, qui se lisent ici dans la richesse et la densité extraordinaires du vin, là où 2008, le précédent millésime, était davantage sur la tension, la minéralité et la profondeur. « En 2012, les pinots noirs d’Aÿ étaient puissants mais avec une présence trop forte justement pour rejoindre l’assemblage de Grand Siècle, en revanche, ils reflétaient de manière éclatante l’identité de l’année et avaient donc toute leur place dans la cuvée millésimée où ils figurent aux côtés de Bouzy, Verzy et Mailly. Nous avons aussi intégré pour la première fois Rilly-la-Montagne, bien que le cru ne soit pas classé 100 %. D’habitude, ce sont des vins qui évoluent trop vite pour rejoindre le millésimé, mais sur cette petite récolte, il y avait toute la concentration nécessaire. Signe de cette maturité vous observerez la mousse persistante, une autre signature de 2012, l’ensoleillement ayant généré un taux élevé de protéines. »
Ce vin ample dès l’attaque reste en même temps vif. On appréciera les arômes d’agrumes, une pointe de calcaire, et une fois le vin réchauffé l’émergence de notes d’ananas. Si l’assemblage met à parité chardonnays de la Côte des Blancs et pinots noirs de la Montagne, ce sont les premiers qui constituent la colonne vertébrale du vin et qui dominent du premier nez jusqu’à la fin de bouche. En cela, le millésimé 2012 se rattache parfaitement au style de la marque. On s’étonnera d’ailleurs de cette fraîcheur dans une maison qui a opté pour des fermentations malolactiques systématiques. « Le blocage des malos permet certes d’obtenir davantage d’acidité, mais il change aussi d’autres caractéristiques identitaires auxquelles nous tenons, comme le côté un peu beurré. Il est vrai qu’avec les millésimes 2004, 2005, 2006, on a eu peur pour l’acidité des vins, mais elle est remontée et s’est stabilisée les années suivantes. »
Prix : 58 € www.laurent-perrier.com
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