Dimanche 24 Novembre 2024
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01.03.2024
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Face à la pénurie et au mauvais bilan carbone du verre, une start-up toulousaine Green Gen Technologies, s’est attelée à trouver des alternatives plus « développement durable » pour embouteiller vins et spiritueux.
Après plusieurs années de R&D, Green Gen Technologies, entreprise de développement de contenants alternatifs écoresponsables, a imaginé une bouteille en composite à base de fibres de lin. Certes, le matériel léger et respirant n’est pas nouveau. Les Égyptiens l’utilisaient déjà pour ses capacités de thermorégulation dans les vêtements et les habitations, les Occidentaux ont découvert récemment ses vertus, notamment sa résistance aux chocs, pour fabriquer skis, casques, skates, coques de bateaux… La fibre de lin ne nécessite ni arrosage ni engrais pour sa culture, aucun procédé chimique pour sa fabrication et la matière est non seulement biodégradable mais elle fixe le carbone par photosynthèse. Green Gen Technologies, co-fondée par l’ingénieur agro James de Roany et Séverine Laurent, a donc planché sur une technique composite qui marie le lin à une résine naturelle de pin grâce à un process de filage et tressage breveté en 2017.
Tels les princes de Bali…
Les premiers résultats qui ont abouti à cette bouteille en fibre de lin écoresponsable et biosourcée ont d’emblée été encourageants. « Elle ne pèse que 84 g contre 450 g en moyenne pour une bouteille de vin, jusqu’à 900 g en général pour le champagne, souvent plus d’1 kg pour les spiritueux », annonce fièrement James de Roany, qui s’est rapproché du spécialiste des technologies en fibres naturelles, le Suisse Bcomp pour aller encore plus loin. La bouteille ne peut être étanchéifiée que par une couche de PET alimentaire « aisément dissociable du composite dans l’eau et donc recyclable en théorie mais nous avons aussi travaillé à une seconde vie avec une réutilisation en carafe ». L’ingénieur aime rappeler qu’il suit « le principe de de sérendipité à l’instar des princes de Bali. Partis à dos d’âne découvrir leur île, ils sont allés de découverte en découverte au hasard des rencontres. Ou comme un mineur de fond qui pioche encore et toujours sans savoir sur quel trésor il peut tomber. » Après un passage dans l’émission « Silence ça pousse » puis dans un reportage de France 3 Occitanie, tout s’est accéléré. « Nous avons été contactés en un temps record par une foule de business angels qui s’intéressaient au process et voulaient participer au financement. »
Une première usine à Bergerac
Tout s’accélère. Les levées de fonds vont permettre d’embaucher deux ingénieurs en textile et chimie des matériaux et de passer d’un premier prototype à une échelle plus industrielle, ne serait-ce que pour faire baisser le prix de la bouteille de 7 € au départ à 3,50 € l’an dernier, ramené autour de 2,50 € aujourd’hui. Green Gen intègre la Maison des Startups de Moët-Hennessy, incubateur d’entreprises innovantes. Elle construit un premier atelier à Portets-sur-Garonne (31) puis une usine pilote à Bergerac (24) ouverte il y a quelques mois grâce à une levée de fonds de 1,76 M€. La collaboration avec le business angel Yann Cohen-Addad, qui a drainé de nombreux investisseurs vers le projet, a également été déterminante. Une nouvelle levée de fonds de 500 000 € en obligations convertibles puis de 1,7 M€ d’ici juillet participeront à franchir une nouvelle étape avec un autre modèle encore tenu secret élaboré à partir d’un PET recyclé. La nouvelle usine, installée dans un ancien entrepôt de l’armée et forte désormais de 14 salariés, devrait produire environ 160-170 000 bouteille cette année avec un potentiel de 3 millions l’an prochain, 30 millions d’ici trois ans selon la demande.
En attendant la nouvelle bouteille
« Mais pour l’instant, nous préférons travailler avec de petits opérateurs car le process d’assemblage du premier modèle est lent » avoue James de Roany. Il est en négociation avec deux opérateurs français pour distribuer quelques dizaines de milliers de bouteilles de son Petit Cernin rouge (19 €), un IGP Périgord de la Maison Wessman que pilote l’ingénieur en parallèle. La bouteille en fibres de lin a également été adoptée par la maison de cognac A. De Fussigny, son jeune pdg, Thomas Gonon, ayant participé à la première levée de fonds pour acheter les moules. « Nous sommes fiers d’avoir été les premiers à utiliser cette bouteille qui est l’une des solutions les plus basses en émissions de gaz à effet de serre. Nous n’en avons pas demandé l’exclusivité pour qu’elle soit diffusée le plus largement possible pour le bien-être de la planète. » Elle est utilisée pour le cognac VS bio baptisé 2050. La maison d’armagnac Castarède l’a également choisie pour la cuvée de ses 190 ans ainsi que le vin norvégien FreyjaVin, la gamme de spiritueux britanniques Korinthian… Green Gen dispose désormais de trois formes de bouteilles en fibres de lin, une bordelaise, une bourguignonne et une pour les spiritueux sans compter une gourde en composite de bois et résine végétale 100 % Sud-Ouest en attendant de découvrir la nouvelle bouteille promise pour le printemps.
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