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Les Vignobles Brumont, d’Alain à Antoine

Auteur

Frédérique
Hermine

Date

19.04.2022

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A 76 ans, Alain Brumont revient sur ses 40 millésimes avant de passer le relais à son beau-fils Antoine Veiry.

Pour ses 40 ans de millésimes, Alain Brumont avait fait mettre les petits plats dans les grands au Bristol à Paris et avait sorti ses plus belles bouteilles. Toujours aussi pugnace et loquace, intransigeant et intarrissable, il a retracé son parcours dans le vin. « J’étais déjà à courir les réunions agricoles dans les années 50 et à 16 ans, mon père m’a retiré du lycée pour travailler sur ses 12 ha de vignes et 30 de céréales, j’ai bossé avec lui jusqu’à mes 30 ans, à la dure 15 h par jour sans salaire mais ça m’a forgé le mental ». Finalement en empruntant au Crédit Agricole, il parvient à acheter une vigne à Montus, un vin renommé depuis qu’un foudre a été offert en 1760 à Napoléon 1er. « C’était déjà un indice de qualité tout comme le fait que les grands bordeaux venaient chercher jusqu’au début du XXe siècle des vins médecins à Madiran» souligne celui que l’on surnomme vite dans le vignoble Monsieur de Montus de La Romanée Conti tant il scrute les parcelles de son terroir pour acquérir les meilleures, souvent en friche dans un pays de polyculture. Après avoir racheter les vignes, il acquiert le château Montus alors en ruine. Il se procure des barriques d’occasion chez le baron Philippe de Rothschild et sort son premier vin en 1982 ; il est à 80% tannat associé au cabernet sauvignon après avoir essayé plusieurs cépages et assemblages, puis trois ans plus tard en 100% tannat pour le Prestige. « La clef était surtout de le ramasser à maturité et de dompter les tanins par un élevage en fût ». Il ambitionne déjà d’en faire « le meilleur vin du Nouveau Monde dans l’Ancien monde ». Entre-temps, Il hérite des vignes de son père à Bouscassé. « J’ai appris beaucoup auprès de Marcel Guigal, Michel Rolland, Jean-Michel Cazes, Henri Ramonteu pour les premières vendanges tardives de Pacherenc du Vic-Bilh en 1988… » et il côtoie le professeur Cabrol, chantre des vins très tanniques et du french paradox qui va faire les beaux jours des madirans. Fort de quelques médailles, il flirte rapidement avec les grands bordeaux et contribue largement à ressusciter ce cépage tannat qui a eu si longtemps bien mauvaise réputation.

Les ajustements d’Antoine Les Vignobles Brumont, c’est aujourd’hui un ensemble de 292 hectares de vignes dont la magnifique parcelle de La Tyre sur le plus haut coteau de l’appellation avec ses galets roulés sur des argiles rouges, et une soixantaine encore à planter. Tout est travaillé en bio non certifié, sans intrant ni insecticide et le vignoble est labellisé HVE. On y fait la part belle aux trois cépages autochtones que sont le tannat, le petit courbu et le petit manseng. Alain, 76 ans, a commencé à passer le relais à Antoine Veiry, 28 ans, le fils de son épouse Laurence : « Alain a créé le style, il ne s’agit pas d’en changer mais de faire quelques ajustements, de chercher à mieux maîtriser les extractions en limitant le plus possible la trituration des raisins, en cherchant davantage l’équilibre par des fermentations plus lentes, en baissant encore les doses de soufre, en travaillant sur des élevages longs comme la cuvée XL (4 ans en fûts neufs et en foudres) mais sans bodybuilder les vins et en travaillant sans intrant ni collage ».  Antoine, arrivé à 10 ans sur la propriété, a signé son premier millésime avec le Montus 2018. Il a déjà fait le tour de nombreux vignobles dans le monde, travaillé chez Anselme Selosse, Joseph Drouhin, Hervé Bizeul, la famille Guigal, aux Carmes Haut-Brion et à son retour, a constitué son équipe (26 ans d’âge moyen). « L’important est de toujours incarner le domaine » conclut Antoine.

©F. Hermine