Vendredi 27 Décembre 2024
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08.08.2012
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Unique démissionnaire du Conseil des Grands Crus Classés 1855, Jean-Hubert Delon, le propriétaire du Château Léoville Las Cases est-il rebelle ou aigri ?
Chaque matin, s’amuse un vigneron de Cantenac, Jean-Hubert Delon « se demande sur qui il va tirer ». « C’est le seul à démonter les autres propriétaires du classement 1855 car il veut faire partie des premiers », ajoute plus crûment une personne responsable de l’institution du Conseil des Grands Crus Classés. Il faut dire que depuis 1998, Jean-Hubert Delon a quitté cet organisme, jugeant à juste titre l’inamovible Classement 1855 « contestable » ! « Certains se servent du classement ; ils font du Tati et encaissent des prix Hermès », avait-il déclaré à ce moment là. La vérité est surtout qu’il ne digère pas l’entrée de Mouton Rothschild en 1973 au rang des premiers. Et lui ?
A défaut d’être Premier, Delon n’est pas le dernier à ruer dans les brancards. Qui se cache derrière ce mauvais garçon, propriétaire de la petite centaine d’hectares du Château Léoville Las Cases, ce prestigieux Saint-Julien et second au classement ? L’intéressé côtoie très peu les journalistes : « Je n’ai pas de temps à perdre », s’excuse-t-il. Il n’a pas de temps à perdre non plus avec ceux qui vendent son vin, à savoir de modestes cavistes qui souhaitent le connaître.
« Les Delon, de père en fils, ce sont des cas, reconnaît Michel Bettane. Jean-Hubert est persuadé d’être le meilleur, comme beaucoup, ce qui le rend si perfectionniste et si exclusif, mais il est généreux ». Ses voisins vignerons sont plus incisifs. « Le problème est que le propriétaire se prend pour un cru alors que c’est son domaine qui est classé et pas lui », souffle l’un d’eux. « Un aigri de nature », se permet un autre. L’excellent vin comme le mauvais caractère de Jean-Hubert Delon dérangent !
A fortiori, la 404ème fortune de France (dans un récent classement de Challenges) dénote dans le paysage de la rive gauche de Bordeaux. Pour le moins, c’est un ours. Le sexagénaire Delon ne court pas les mondanités. Ce n’est pas son truc. Encore de quoi faire hausser les épaules dans les salons girondins. Bon vivant, chasseur, gastronome, collectionneur de pontages, l’avocat de formation fait profiter sans cravate ni gomina d’une cave digne d’un trois étoilés Michelin. Un vrai personnage de roman, entre Rabelais et Mauriac, ogre bourru mais insaisissable tel une poignée de sable.
Prétentieux certainement, aigri peut-être, non-conformiste sans aucun doute. Le Céline du Médoc n’a pas fini de hanter le milieu très convenu de 1855 ! N’empêche, c’est bien un Léoville Las Cases de l’année 1953 que Louis de Funès, alias Charles Duchemin, reconnût d’un simple coup d’œil dans L’Aile ou la Cuisse. Et pas un autre.
Par Jean-Charles Chapuzet. Photographie Rodolphe Escher.
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