Vendredi 27 Décembre 2024
Photo: M. Strullu
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Date
18.03.2022
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Régis Camus prend sa retraite de chef de caves de la Maison Rare après une carrière de près d’un demi-siècle ! Une page d’histoire de la Champagne se tourne même si ce pilier de la profession a encore de beaux projets…
Comment êtes-vous tombé dans la marmite champenoise ?
Dans ma jeunesse, je rêvais d’être instituteur, celui des années 1950, le hussard de la république... Ma famille habitait le Nord de l’Aisne et l’université de Reims était la plus proche. En 1973, on était en plein choc pétrolier, donc la métallurgie, l’industrie, ne me semblaient pas des voies d’avenir alors que l’agroalimentaire, je me suis dit que cela marcherait toujours. Je me suis orienté vers l’œnologie qui est devenue ensuite une passion. Je n’étais pas champenois, mais cela ne m’a pas empêché de devenir un fervent défenseur de l’appellation. En venant de l’extérieur, on en voit parfois plus facilement la richesse que ceux qui y sont nés. Combien de fois lors de voyages, mes collègues me donnaient un coup de coude en me disant : « tu parleras quand même un peu de nos marques ! »
J’ai débuté à la CRVC (Coopérative Régionale des Vins de Champagne) en 1974 où Jacques Peters était mon maître de stage. En 1978, il m’a contacté alors qu’il partait chez Veuve Clicquot en s’étonnant de ne pas avoir reçu ma candidature. Je devais avoir trois mois de passation avec Jacques Peters, je n’ai eu que trois jours ! Je suis resté quinze ans avant de rentrer chez Piper-Heidsieck et Charles Heidsieck en 1994. Ma première mission a été l’accompagnement de l’installation du site Allée du vignoble. Je surveillais les fouilles, tous les jours j’allais voir les archéologues en espérant qu’ils n’aient rien trouvé. Nous n’avions plus de cuverie et celle-ci devait être prête pour rentrer la vendange 1995 ! Ils cherchaient un char gaulois et son conducteur, mentionnés dans un livre de 1911.
Votre millésime préféré ?
1979 : l’année où je suis rentré chez Jacquart et où j’ai tout appris. On a fini la vendange presqu’à la Toussaint, on avait dû reclasser les coteaux champenois, c’était une année hyper compliquée qui a donné des vins racés. Au milieu des années 1980, on m’a offert une caisse de Rare 1979, j’avais été bluffé par la personnalité de ce vin et je n’imaginais pas qu’un jour je deviendrais chef de caves de cette maison !
Un souvenir que vous emportez avec vous ?
Le 8 juillet 2011, lors de notre soirée cinéma, nous recevions tous nos livreurs. Rémy Cointreau avait mis la maison en vente, ses représentants ne voulaient pas venir. Christopher Descours n’avait pas encore signé et ne pouvait se joindre à nous. Le matin, j’ai appelé Jean-Marie Laborde (le directeur général du groupe de l’époque) en lui demandant qu’est-ce que je dis ce soir ? Je vais me retrouver devant 500 vignerons ! A 14 heures, il m’a rappelé : « vous aurez la famille Descours même si ce n’est pas signé ! » Le film portait justement sur la succession d’un domaine viticole : « Tu seras mon fils ».
Qu’est ce qui a le plus changé en Champagne ?
Le métier de chef de caves ! Au début des années 1980, le chef de caves s’occupait de la vendange, des vins, mais il achetait également les bouchons, les cartons, il était le chef du personnel… Ce n’était pas seulement un chef d’orchestre, mais aussi un homme-orchestre ! Le rapport au vignoble a aussi évolué. Lorsque j’ai été embauché chez Jacquart, le directeur m’avait interdit d’avoir des relations avec les vignerons en dehors de mon travail, m’enjoignant de ne pas mélanger vie privée et vie professionnelle. A mon arrivée chez Piper, j’ai au contraire bâti les relations vignoble sur le côté familial. Quand j’allais dans la côte des Bar, en général le weekend, je partais avec mon épouse. Nous avons construit de véritables amitiés. J’ai toujours adoré ces rencontres avec les vignerons. A l’âge de huit ans, je suivais mon grand-père qui était entrepreneur de battage et allait de ferme en ferme, cette compréhension du monde paysan m’a servi plus tard.
Quels sont vos projets pour l’avenir ?
Depuis sept ans, j’élabore des sakés avec Heaven. Les Japonais sont un peu enfermés dans leur monde. A travers une multitude de dégustations, nous avons cherché ce qui pouvait plaire à des occidentaux. Aujourd’hui, j’en bois plus que du champagne. A la fin du repas, à la maison, j’adore accompagner le fromage d’un petit verre de saké, je suis comme un gamin !
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