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Une soif de chiffres pour les vins sans alcool

Auteur

Frédérique
Hermine

Date

08.01.2025

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Pour le dry january, la Maison Chavin, pionnière des vins sans alcool, a commandité au bureau d’études CSA un observatoire des chiffres pour mieux cerner ses consommateurs et l’ampleur du phénomène. Les résultats sont surprenants.

L’engouement pour le dry january ne cesse de croître dans l’Hexagone. Né en 2013 en Grande-Bretagne, débarqué presque clandestinement en France en 2019, il semble s’installer depuis deux ans. Mais au-delà d’une communication de plus en plus présente, la Maison Chavin, pionnière du vin sans alcool depuis 2010, a voulu en avoir le cœur net en commanditant une étude sur le sujet à l’institut CSA*. « Nous n’avions pas de chiffres. Quelques idées mais aucune réponse quantitative, hormis quelques éléments ne concernant que la GD, déplore Mathilde Boulachin, fondatrice dirigeante de la Maison qui réalise à ce jour 15,5 M€ de chiffre d’affaires (dont 90 % à l’export) pour plus de 2,5 millions d’unités par an. (+ 35 % en 2024). Dans la catégorie no-low, nous nous sommes focalisés sur le sans-alcool pour lequel nous réalisons la plus forte croissance, l’allégé n’étant pour nous qu’une niche. » 

Une lame de fond 

L’étude semble démontrer que les Français font de plus en plus attention à leur consommation. « Quand on me demande si c’est une tendance ou un phénomène de fond, je le vois plutôt monter comme une lame de fond ». D’après le sondage CSA, 71 % des personnes interrogées ont déjà entendu parler du dry january. Un chiffre élevé au regard de sa récente création. Et 55 % savent exactement de quoi il s’agit. 19 % déclarent y avoir déjà participé une fois, 6 % plusieurs fois. Les deux tiers ont tenu la résolution tout le mois.

« Depuis trois ans, on voit bien que ça s’accélère avec une vraie poussée médiatique en 2024 et une accélération commerciale, reconnaît Mathilde Boulachin. La boutique en ligne nous sert de test avec une envolée des ventes (+70 % pendant le dry january). L’événement est relayé par nos distributeurs qui font campagne et par des communautés qui s’installent comme les sportifs pour se motiver ».

L’étude fait apparaître 12 % de Français supplémentaires qui envisagent de suivre le dry january pour la première fois en 2025. 94 % estiment que c’est une excellente résolution de début d’année et 9 sur 10 un excellent moyen de découvrir les boissons sans alcool. Parmi les participants, 41 % ont moins de 35 ans dont un tiers entre 18 et 24 ans (vs 25 % pour les consommateurs de boissons alcoolisées) tandis que les seniors de plus de 65 ans sont sous-représentés (10 %). Ils sont à 44 % des CSP+, déjeunent souvent à l’extérieur pour 60 %, sont plutôt sportifs (8 sur 10) et ont une vie sociale très active pour les deux tiers. « C’est en fait une population dynamique, attentive à la mode et à son look, qui fait attention à elle », résume Claudine Brûlé, directrice du pôle consommation de CSA. 

Une consommation plus modérée, mais en flexi drinking

Mathilde Boulachin insiste sur le fait que « les pratiquants du dry january ne sont pas forcément des consommateurs qui n’aiment pas l’alcool ; on parle aussi à des amateurs de vins et spiritueux ». L’étude semble l’avérer, même si après janvier, 47 % déclarent qu’ils vont réduire leur consommation d’alcool. Cette orientation vers une consommation plus modérée s’accompagne d’un « flexi drinking » renforcé selon les moments. Car 81 % des participants au dry january consomment du vin, un quart même plus de deux fois par semaine, 29 % se considérant comme expert ou connaisseurs, une part plus importante que les consommateurs en général. 46 % sont des consommateurs toutes boissons : 9 sur 10 de bière, idem pour les energy drinks, 83 % de spiritueux. 

« Ils aiment tester, goûter, mélanger, résume Claudine Brûlé qui précise qu’un quart des sondés ont déjà goûté des vins sans alcool, 13 % dans les 12 derniers mois et la moitié en boivent une fois par semaine. 6 % y sont s’y sont mis récemment, depuis moins de deux ans. « Ce qui tend à démontrer une pénétration croissante de la catégorie ». « On ne peut plus parler d’un marché de niche » insiste Mathilde Boulachin. D’autant plus que les vins sans alcool ont fait un bond de 23 % en 2023 en GD selon Nielsen, + 28 % au premier semestre 2024, et même de 32 % à l’échelle européenne. 

À la même table autour d’un verre

« La France qui était à la traîne tend à rattraper son retard, estime la dirigeante de Chavin. Nous exportons dans une soixantaine de pays et surtout dans ceux qui ont déjà une culture du vin et pas qu’au Moyen-Orient contrairement aux idées reçues. Nos consommateurs aiment se retrouver à la même table autour d’un verre que ceux qui boivent de l’alcool. On emprunte les codes du vin avec une expérience qualitative derrière un packaging étudié. D’où notre présence privilégiée chez les cavistes et dans les restaurants. » L’objectif de la maison est d’ailleurs d’être présent sur les tables étoilées. « Je rêve qu’à l’apéritif le sommelier propose à ses clients : “Un verre de champagne ou un Chavin ?” ».

Chavin y travaille par les extensions de gammes avec des travaux sur les cépages et « une innovation constante de plus en plus sophistiquée ». Reste à faire de la pédagogie pour savoir expliquer en quelques secondes ce qu’est un vin sans alcool et pas seulement du jus de raisin sans forcément entrer dans des explications techniques complexes de la technologie. Le dry january est-il la cause ou la conséquence de la déconsommation ? Mathilde Boulachin penche plutôt pour la deuxième version : « En tout cas, nous assistons à une véritable révolution de la consommation qu’il faut saisir en s’interrogeant sans cesse sur ce que veulent les consommateurs et en suivant les enjeux sociétaux (santé, conduite au volant) ».

*Étude réalisée en octobre dernier auprès d’un échantillon de 1 008 Français de 18 ans et plus avec un sur-échantillon de consommateurs de vins sans alcool.