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Wine Paris et InterLoire expérimentent le réemploi des bouteilles

Bouteilles vides

Bouteilles vides allant au recyclage ©cottonbro studio

Auteur

Lucie
de Azcarate

Date

15.02.2025

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Alors que Wine Paris, la vitrine internationale des vins et spiritueux a fermé ses portes, en coulisses, a débuté une nouvelle étape du cycle de vie des bouteilles échantillonnées. Pour la deuxième année consécutive, avec le concours de la société Eco In Pack, elles seront lavées et remises sur le marché. Prochainement, l’anecdote devrait prendre de l’ampleur : InterLoire a profité du salon pour se positionner en pionnier de la filière sur le projet. 

Le réemploi occupe le devant de la scène, mis en lumière lors de salons comme ALT’ ou Wine Paris. Néanmoins, il ne représente qu’une portion infinitésimale des bouteilles mises en circulation, soit moins de 1 % et ne menace donc pas l’industrie verrière qui recycle environ 70 % des bouteilles utilisées en France. Mais la donne pourrait changer. La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC, février 2020) crée un contexte légal favorable au réemploi, désormais encouragé par les pouvoirs publics, notamment grâce à des subventions. 

Laver les bouteilles, un gain écologique 

Sur le papier, le réemploi des bouteilles représente un gain écologique indéniable. Pour une bouteille de vin produite, la moitié de l’empreinte environnementale provient de l’emballage et, sur cette moitié, la bouteille représente 70 %. La température de fusion du verre, entre 1500 et 1600°C (1300°C pour le verre recyclé) y est sans doute pour beaucoup. Le réemploi, par rapport au recyclage, représente 70% de dépense énergétique en moins et 30 % d’eau en moins. Quant au problème d’émission de gaz à effet de serre, à l’échelle nationale, la collecte de bouteilles est encore gagnante : la fabrication d’une bouteille de 500g émet plus de CO2 que son transport sur une distance allant jusqu’à 7000 km. 

Aujourd’hui, les facteurs qui limitent la généralisation du recours au réemploi sont les capacités de lavage et l’absence d’un système de collecte efficace. Pourtant les initiatives se multiplient. Eco In Pack s’équipe et automatise son process. Quant à la « reverse logistic », la « collecte » des bouteilles en bon français, certains producteurs se sont emparés du problème à l’instar du Domaine de Haute-Perche en Aubance qui est devenu point de collecte « Bout à Bout » pour la consigne de verre. Cette initiative devrait faire des émules dans la région, d’autant qu’InterLoire, précurseur sur les sujets environnementaux, s’engage dans une expérimentation à l’échelle régionale. 

InterLoire se positionne en pionnier du réemploi

En matière environnementale, les vignobles de Loire entendent conserver leur place de leader dans la filière viticole. Depuis 2019, ils briguent l’objectif de 100 % du vignoble ligérien engagé en certification environnementale ou en agriculture biologique d’ici à 2030. Déjà 80 % des surfaces du vignobles répondent positivement à cette exigence. Désormais l’interprofession se tourne aussi vers le réemploi : « Nous avons une approche pragmatique et globale du sujet de la décarbonation de la filière, précise Sophie Talbot, directrice d’InterLoire. Nous avons fédéré un consortium de 12 opérateurs : caves coopératives, domaines, négociants, pour répondre à un appel à projet d’Adelphe-Citeo et nous avons été retenus ». Concrètement, le projet porte sur le réemploi des bouteilles, avec un objectif de 3 millions de cols. Quant à InterLoire, l’interprofession prendra une part active dans le projet : « L’enjeu est d’arriver à fermer la boucle du réemploi : non seulement utiliser des bouteilles lavées, mais aussi être capable de les collecter. Nous allons donc nous engager pour la diffusion du geste du réemploi. C’est une porte que nous ouvrons collectivement, ensemble nous pourrons trouver des solutions et pourquoi pas partager notre expérience avec d’autres opérateurs voire d’autres interprofessions ». L’implication d’InterLoire permettra un retour sur expérience propre à lever les doutes qui pèsent sur le réemploi comme la supposée fragilité des bouteilles ou leur qualité après lavage etc. 

3 questions à Martin Calmettes, co-fondateur d’Eco In Pack, partenaire de Wine Paris pour le réemploi des bouteilles 

Que représente pour vous le partenariat avec Wine Paris ?
Sans conteste une opportunité ! C’est l’occasion pour nous d’expérimenter. Le salon est international donc nous avons à notre portée un échantillon diversifié des bouteilles employées par les producteurs de vins à travers le monde. Si nous restions cantonnés à Cognac, nous n’aurions pas cette perspective complète des standards de bouteilles utilisés dans l’industrie des vins et spiritueux.
C’est la deuxième année consécutive que Wine Paris nous accorde sa confiance. L’année dernière, nous avions collecté 80 000 bouteilles. Cette année nous visons les 100 000 et nous allons probablement revoir ce chiffre à la hausse. Nous allons également pouvoir tester notre solution d’automatisation du tri sur un panel de bouteilles très diversifié. En bout de chaîne, nous pensons pouvoir réemployer environ 50% des bouteilles collectées. 

Quels sont les principaux freins au réemploi des bouteilles ?
D’abord il y a la problématique des étiquettes que nous ne pouvons pas, ou difficilement, décoller. Tant que les producteurs ne s’empareront pas du sujet ce sera le principal frein.
Ensuite cela se joue sur les standards de bouteille. Par exemple, il existe 130 moules verriers différents pour les bouteilles bordelaises standards. Tout l’enjeu pour nous et de constituer des lots homogènes que nous pourrons ensuite revendre. Nous nous appliquons donc à identifier les standards de bouteilles les plus utilisés par les producteurs pour gagner en efficacité et laver les bouteilles que nous pourrons valoriser ensuite. A ce jour, notre catalogue de bouteilles disponibles pour le réemploi compte plus d’une centaine références dans les principaux formats utilisés en France.  

Qu’en est-il des bouteilles dont le plan verrier est déposé ?
Pour les bouteilles iconiques deux choix s’offrent à nous : soit nous nous engageons à les détruire, nous ne pouvons, de toutes façons, les vendre, soit la marque travaille avec nous. C’est le cas, par exemple de Giffard. La marque a pourtant allégé le poids de sa bouteille iconique mais, dans la mesure où les bouteilles ne subissent pas de contrainte mécanique forte sur nos chaînes, nous pouvons manipuler tout type de bouteilles en verre, même les plus légères.