Jeudi 26 Décembre 2024
Photo Frédérique Hermine.
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13.11.2015
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Cassis, c’est blanc. A près de 80%, sous l’influence de la marsanne et de la Méditerranée. Et la douzaine de producteurs monte désormais en gamme dans cette couleur avec de jolies cuvées parcellaires.
Cassis aurait pu avoir ses crus. L’appellation se contentera de sélections parcellaires. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir essayé. Suite à une étude de terroir très pointue il y a une dizaine d’années, l’Inao s’était montrée favorable à une hiérarchisation par les lieux-dits avec possibilité de repli en Cassis. Trois terroirs avaient été identifiés, La Gare, les Janots et les Coteaux. Mais comme les 11 producteurs de l’appellation n’auraient pas eu de parcelles élues, le syndicat n’a jamais obtenu l’unanimité pour faire bouger les lignes au grand dam de Jean-Francois Brando (domaine de Fontcreuse), le président de l’époque. « Nous sommes restés en appellation communale avec une image de petit vin sympathique pour les vacances, en moyenne entre 8 et 9 € en supermarché, parfois moins en promo, 30-35 € en restaurant, et il est souvent difficile de mieux valoriser nos vins au dessus de 10 €».
La marsanne majeure
Il a fallu défendre également une typicité avec la marsanne en cépage dominant pour des blancs représentant 80% de la production. Jean François Brando voulait 50% minimum, d’autres voulaient davantage de clairette dans les blancs, plus de grenache et de mourvèdre pour développer les rosés et les rouges dans lesquels la syrah domine. Finalement, la marsanne a été imposée pour au moins 30%, complétée par la clairette et l’ugni blanc. « C’est le muscat rapporté par le roi René chassé de Naples qui a fait connaître les vins de Cassis, mais il a disparu avec le phylloxera. Les vins secs et minéraux, plus adaptés à la cuisine locale, l’ont alors remplacé, regrette Nicolas Bodin (domaine Cassis Bodin). Pourquoi ne pas en replanter pour faire du muscat pétillant? Et développer les rouges. Servis frais, ils sont faciles à boire l’été ».
C’est oublier un peu vite qu’une vraie unité organoleptique est un sérieux atout pour faire connaître une appellation. Et Cassis peut donner de très jolis blancs et pas seulement des vins de plage pour coquillages et crustacés. Dans un univers méditerranéen très concurrentiel en rosé majeur (les cassis étant moins connus et plus chers que les provences), mieux vaut mettre en avant sa blanche différence. La famille Genovesi en est convaincue. Moins de 10 ans après avoir racheté le domaine du Bagnol, elle a cessé de produire des rouges, remplacés par des rosés, et Sébastien qui a pris la suite de son père reste convaincu que « Cassis, c’est d’abord le blanc, élevé en cuve pour conserver la fraîcheur du fruit, même si l’on fait des essais en bois ». C’est aussi l’avis du jeune président de l’appellation, Jonathan Sack (Clos Sainte Magdeleine, dont nous parlions ici), qui a également replanté du vermentino et du bourboulenc en prévision du réchauffement climatique. « Il faut miser sur une image de blanc dans un océan de rosés et monter en gamme en développant des cuvées parcellaires qui peuvent être la première marche vers une démarche ‘cru’ qui prendra du temps ».
Une jolie carte postale
La seule appellation viticole au milieu d’un parc national, celui des calanques créé en 2012, entend également jouer la carte environnementale pour renforcer cette belle image de vignoble du littoral, celui que l’on aperçoit des banquettes (terrasses) du Cap Canaille aux panoramas somptueux. La salinité des blancs, l’une des caractéristiques majeures de cette appellation aux portes de Marseille, rappelle aussi la proximité de la Grande Bleue. Autant de particularités à faire connaître plus loin que les Bouches du Rhône afin que les consommateurs, surtout à l’étranger, ne demandent plus aux producteurs cassidains si leurs vins sont toujours élaborés avec de la crème de cassis…
Notre sélection :
Domaine de Bagnol 2014 Cuvée Tradition : 50% marsanne (fermentée en barriques) complétée de clairette et ugni blanc. Un joli nez d’eucalyptus, de tilleul et de rose ancienne, une belle rondeur sur une douce amertume d’agrumes.
Château Barbanau 2013 Clos Val Bruyère : (en bio) Autant de marsanne que de clairette et d’ugni blanc complétés par le sauvignon. Un nez d’eucalyptus et de fleurs blanches, des arômes de fruits exotiques et une belle longueur citronnée.
Domaine de la Ferme blanche 2014 : 25% de marsanne et d’ugni blanc complétés de clairette, d’ugni, de bourboulenc et de sauvignon. Un bel équilibre plus rond entre floral (chèvrefeuille) et agrumes sur une pointe anisée.
Bodin Château de Fontblanche 2013 Notre Dame des Lumières : Les meilleurs jus de goutte et de presse à 30% marsanne, 30% clairette, 30% sauvignon et 10% d’ugni blan. Des notes d’eucalyptus sur une belle minéralité, une jolie longueur en bouche sur une finale saline.
Château Fontcreuse 2014 : Un joli nez mentholé sur des notes d’écorces de pamplemousse, la belle amertume de la marsanne majoritaire (avec clairette et ugni blanc) et une grande longueur aromatique.
Saint-Louis Jayne 2014 cuvée Fonfon (en bio, et biodynamie non certifiée) : Assemblage de clairette, marsanne, bourboulenc, ugni blanc et pascal blanc. Minéral, légèrement fumé sur des notes florales (genêts) et des agrumes légers et une note de fenouil.
Clos Sainte Magdeleine cuvée Bel-Arme 2013 : Marsanne à 60% avec de la clairette, de l’ugni blanc et un peu de bourboulenc apportant fraicheur et finesse. Ni filtré, ni collé. Une grande élégance florale et minérale, une petite note de miel sur une finale tout en fraicheur.
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